CINEMA - « Habemus papam »

Un grand Piccoli

Publié le 16/05/2011
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Crédit photo : DR

ON PEUT COMPTER sur Nanni Moretti pour faire rire avec intelligence de questions éminemment politiques, à savoir, pour qui et pourquoi vouloir le pouvoir. Même si son engagement a pris d’autres formes que dans les années 1980 et 1990 et s’il se défend d’être « conditionné » par l’actualité.

Pour ce non croyant, issu d’une famille catholique, il s’agissait moins, en osant raconter l’histoire d’un cardinal affolé lorsqu’il est élu pape, d’évoquer l’église que le malaise et le sentiment d’inadéquation d’un homme, sentiment que chacun peut ressentir.

Pas de recherche inutile de réalisme ou de précision cardinale. Le Vatican, le conclave et les cardinaux de Moretti n’en sont pas moins convaincants dans le cadre de son piquant récit. Et l’on a tous les éléments du dispositif d’élection qui, nous explique le dossier de presse du film, se fait en conclave depuis 1274. Les favoris n’étant pas départagés par plusieurs tours de scrutin, c’est donc un outsider, le cardinal Melville, qui est élu. Mais au moment d’apparaître sur le balcon, révélant ainsi à la foule réunie place Saint-Pierre l’identité du nouveau souverain pontife, il recule. À partir de là, tout déraille gentiment.

On ne gâchera pas le plaisir des spectateurs, qui découvriront le film à partir du 7 septembre, en évoquant les épisodes savoureux des quelques jours qui suivent, au milieu des cardinaux, toujours enfermés, et dans les rues de Rome, où le nouvel élu s’offre une fugue.

Il sera question de religion, un peu, mais aussi de psychanalyse, de sport et surtout de théâtre (et, comme souvent, c’est Tchekhov qui est convoqué). Homme politique ou pape, il faut savoir jouer la comédie, avoir envie de la jouer, du moins avoir envie du rôle. Et c’est là que Michel Piccoli, qui a plus de 80 films à son actif, donne la mesure de son talent. Dans une amusante mise en abîme, le comédien incarne un homme qui a renoncé dans sa jeunesse à la scène théâtrale et doit maintenant jouer, pour 1 milliard de personnes, un rôle qui ne lui convient pas. Il est sobre, émouvant et jamais clown, même si les interrogations de son personnage font rire. Applaudissons !

R. C.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8963