Un nouveau réalisme poétique

Tout étonne et dépayse dans cet étrange spectacle intitulé « Tristesses », qui se déroule sur une île, au nord du Danemark, une île nommée « Tristesse », sans « s » final. Lorsque ce spectacle a été présenté à Avignon en 2016, on ne connaissait pas en France le travail de l’artiste, metteuse en scène et comédienne Anne-Cécile Vandalem. Il est donc aujourd’hui repris à l’Odéon, dans les ors et le velours.

On découvre le village, des maisons de bois, assemblage harmonieux et mystérieux où se déroule l’action : à l’extérieur, mais surtout à l’intérieur, et les scènes sont alors filmées et retransmises sur un écran qui domine le plateau. Une voix off lie les différentes actions et ce dispositif rappelle un peu les univers étranges et envoûtants de Joël Pommerat.

Auteur de la fable qui se développe sous nos yeux, Anne-Cécile Vandalem s’est inspirée de la montée des extrémismes en Europe, mais il n’y a pas trace d’une démonstration dans la représentation, qui tient plus du conte.

Sombre histoire : les abattoirs, qui étaient la seule source de revenus de l’île, ont fermé. Il ne reste plus qu’une poignée d’habitants. Une femme politique (jouée par Anne-Cécile Vandalem elle-même), débarque. On est à la veille des élections. Pourrait-on reprendre les bâtiments à l’abandon et en faire des studios de tournage ? On n’en dira pas plus, car il y a quelque chose d’un roman policier dans l’intrigue, avec mort suspecte, non-dits, circulation de vieilles rancunes…

Les comédiens sont excellents. La musique, le chant, les lumières, comme les allers-retours entre la vidéo et le jeu à vue, font vivre sous nos yeux un monde insolite, réaliste, mais aussi d’une poésie certaine. À découvrir !

Odéon-Théâtre  de l’Europe, jusqu'au 27 mai.  Durée 2 heures. Tél. 01.44.85.40.40, www.theatre-odeon.eu.fr