NOUS SOMMES en 1992 dans une banlieue résidentielle aux maisons bourgeoises identiques, à la « Desperate Housewives ». Un décor qui, à lui seul, crée l’inquiétude, malgré l’aspect coquet. En 1992, Fabrice Gobert, dont c’est le premier long métrage, était en classe de première et un élève du lycée avait disparu. C’est le point de départ de son scénario et la date n’est pas indifférente pour le séduisant récit qu’il va nous faire : en 1992, il n’y avait pas encore, dans la vie des adolescents, Internet et les téléphones portables, un décalage temporel qui, comme l’explique le jeune cinéaste, donne effectivement une certaine étrangeté à l’ensemble.
Donc, Simon Werner, élève de Terminale C, a disparu. Fugue, enlèvement, suicide, meurtre, toutes les hypothèses sont envisagées par ses camarades. La tension monte encore quand, quelques jours plus tard, une élève de la même classe est portée absente. Cela commence comme un thriller, mais ce qui intéresse Gobert, outre de décrire cet âge où l’imagination galope, c’est de jouer avec les genres, teenmovie, film d’épouvante, drame psychologique.
Une ambition qui passe par une construction astucieuse et des dialogues à double ou triple sens. Le film est divisé en quatre chapitres, chacun étant centré sur un personnage principal. On va donc voir et revoir évoqués les mêmes événements, mais qui, vus par l’un ou l’autre des protagonistes, prendra un sens différent. Une conversation saisie au vol qui semble contenir une menace apparaîtra, par exemple, anodine dans la version suivante. Comme les lycéens, le spectateur bâtit des hypothèses, vite battues en brèche. C’est très stimulant.
Autre qualité du film, ses interprètes, très bien choisies. On applaudit Ana Girardot, la fille d’Hippolyte, qui a bien des atouts, Jules Pelissier (vu dans « Bus Palladium »), Laurent Delbecque, Selma El Mouissi, entre autres. La musique originale de Sonic Youth est à l’unisson. Un cinéaste à suivre.
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