Les deux opéras de Chostakovitch n’encombrent pas l’affiche des théâtres lyriques et c’est une aubaine que l’Opéra de Lyon ait invité Dmitri Tcherniakov à remonter, après Düsseldorf puis Londres, son opéra maudit, « Lady Macbeth de Mzensk », créé en1934. Le metteur en scène moscovite, trublion de la scène lyrique, n’est jamais aussi inspiré que dans le répertoire russe, depuis l’« Eugène Onéguine » du Bolchoï qui a lancé sa réputation, mise en scène que l’on a pu voir à Paris en 2008. Certaines de ses productions sont légendaires, comme sa « Khovanchtchina » à l’Opéra d’État de Bavière, « le Prince Igor » au Met de New York ou « la Fiancée du Tsar » à Berlin, toutes disponibles sur DVD (Bel Air Classics). En mars il sera de retour à l’Opéra de Paris pour « Iolanta », de Tchaïkovski.
Pour « Lady Macbeth », Tcherniakov ne résiste pas (son péché mignon) à bousculer légèrement la fin mais, contrairement aux « Dialogues des Carmélites » montés à Munich, sans en modifier le sens. Sa mise en scène comporte de nombreuses trouvailles et un coup de génie. Il situe presque tout l’opéra, qu’il débarrasse au maximum de son aspect caricatural, dans un lieu unique, l’usine des Izmaïlov, transposée au XXIe siècle avec ordinateurs et néons. À l’intérieur s’encadre l’appartement d’Ekaterina Izmaïlova, figuré comme une cage tapissée de tapis orientaux, dans lequel elle évolue en costumes traditionnels. Et pour l’acte final du bagne, toute l’action est condensée dans une cellule de prison isolée sur la scène comme une boîte à chaussures. Au prix de petits aménagements dans l’action, cela fonctionne parfaitement et donne une force théâtrale supplémentaire à ce long ouvrage à la découpe cinématographique. Autre coup de génie, quelques scènes muettes, pendant les interludes musicaux, parenthèses dans le drame, comme la nuit d’amour entre Ekaterina et Sergueï, un moment d’érotisme pur, leur mariage symbolisé par une cérémonie de l’eau et du feu, ou la scène bouleversante où Ekaterina panse les plaies de son amant. Et surtout la scène finale dans la prison, d’une violence qui laisse le spectateur pantois pendant plusieurs heures.
Électrique
Musicalement, c’est avant tout la direction électrisante de Kazushi Ono qu’il faut louer une fois de plus, à la tête d’un Orchestre de Lyon chauffé à blanc dans une partition qui alterne les moments de beauté lyrique intense et d’autres de musique totalement sarcastique. Le Chœur aussi, si important dans cette œuvre, a été magnifique. Bien qu’il ne soit pas la tête d’affiche, c’est Boris, le beau-père d’Ekaterina, qui s’est taillé la part du lion du triomphe au rideau final : la basse Vladimir Ognovenko est une bête de scène aux qualités vocales intactes. Tous les interprètes étaient à la hauteur de leur rôle, même si on n’était pas forcément dans la recherche de la splendeur vocale, et des acteurs de haute volée. Autant la Lituanienne Ausrine Stundyte, Ekaterina poignante, et le ténor anglais John Daszac, que Gennady Bezzubenkov, pope cocasse, et la formidable mezzo-soprano anglaise Clare Presland, à qui revient, dans le rôle épisodique d’Aksinia, une des scènes les plus torrides.
Un de ces spectacles mémorables qui font que l’on ne peut plus regarder et écouter une œuvre comme avant. Et une réussite de plus à l’actif d’un des meilleurs directeurs d’acteurs de la scène lyrique.
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