« L'Art de Suzanne Brut »

Une si lumineuse candeur

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Publié le 09/11/2017
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Théâtre-Suzanne Brut

Théâtre-Suzanne Brut
Crédit photo : STÉPHANE COTTIN

Devant nous, une femme, assise sur un prie-dieu posé sur un socle. Des images vidéo sont projetées de manière continue sur la base de ce socle. Images mouvantes, colorées, qui sont l’essentiel du décor. À la fin, on apercevra des tableaux accrochés aux deux murs de côté de la petite salle des Déchargeurs, les tableaux de Suzanne, la femme que l’on a écoutée une heure quinze durant.

Cette femme ne s’adresse pas directement à nous, mais à deux interlocutrices de prédilection, sainte Jeanne et la Vierge Marie. On comprend rapidement que l’on est au cœur d’un couvent, durant la deuxième guerre mondiale. Et plus exactement pendant l’Occupation. Des soldats allemands habitent dans ce couvent où Suzanne est la servante des religieuses.

Michael Stampe, qui a composé « l’Art de Suzanne Brut », le publie avec « l’Échafaudage », un dialogue entre Michel-Ange et son apprenti Andrea (Dacres éditions). L’auteur est lui-même peintre à ses heures. Deux paroles différentes  : celle d’une femme simple, celle d’un grand artiste cultivé.

Si ce que dit Suzanne nous retient avec force, c’est que la comédienne Marie-Christine Danède possède un art très précis de la suggestion, de l’incarnation. Elle est une excellente interprète, avec un long parcours, loué, reconnu, marqué par un « Molière  ». Avec un léger accent que l’on relie à la campagne, Suzanne dévoile sa vie, jusqu’au secret tragique qui explique sa présence au couvent et une certaine absence à la réalité. Peindre, parler à Jeanne ou Marie, c’est tenir. Donner du sens à sa vie.

Le texte est fluide, savoureux, gorgé de couleurs. Suzanne trouve les morceaux de bois qui lui servent de tableaux, fabrique elle-même ses couleurs, invente d’étranges décoctions. C’est touchant et sans aucune sensiblerie. Ce beau moment a tout d’abord été donné à la Fabuloserie, musée privé qui se trouve à Dicy, dans l’Yonne, et qui mérite votre visite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

– Théâtre Les Déchargeurs, jusqu’au 23 décembre. À 19 h 30, du mardi au samedi. Durée 1 h 15. Tél. 01.42.36.00.50, www.lesdechargeurs.fr
– Fabuloserie, à Dicy, www.fabuloserie.com

Armelle Héliot

Source : Le Quotidien du médecin: 9617