Les députés ont approuvé ce 16 mai en commission le principe de la légalisation de l'aide à mourir, malgré des oppositions parfois virulentes, à droite et à gauche, contre cette disposition centrale du projet de loi sur la fin de vie, et après avoir introduit plusieurs modifications par rapport au texte initial. La commission a jusqu’à ce soir, 17 mai, pour examiner l’ensemble du projet de loi (et les quelque 1 900 amendements déposés) avant sa discussion en séance publique dans l’hémicycle à partir du 27 mai.
L'article adopté par les députés autorise le recours à une substance létale pour une personne qui en fait la demande, sous réserve de strictes conditions qui seront précisées dans la suite du texte. Cette substance peut être administrée par le patient, un médecin, un infirmier, ou une personne volontaire désignée par le patient. « C'est le droit ne pas souffrir et de ne pas subir », a affirmé le rapporteur général Olivier Falorni (membre du groupe MoDem).
Le critère selon lequel les malades doivent avoir leur « pronostic vital engagé à court ou moyen terme » pour être éligible à l'aide à mourir, proposé notamment par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) dans son avis 139, suscitait des interrogations (notamment de la part de l’Ordre des médecins). Il a été supprimé par les députés en commission et remplacé par la notion d'affection « en phase avancée ou terminale ».
Une « clarification » pour certains, une notion « floue » pour d’autres
Les députés ont défendu leur volonté de clarifier le texte, face à la difficulté de définir le moyen terme. « Le court ou moyen terme n'est pas défini par la Haute Autorité de santé », a argumenté la députée Renaissance Anne-Laurence Petel. Catherine Vautrin, ministre de la Santé et des Solidarités, a demandé, lundi 22 avril, un avis à la Haute Autorité de santé (HAS) sur l’évaluation du « pronostic vital à moyen terme ». Mais il est en effet peu probable que ses conclusions soient rendues ces prochains jours.
Pour les opposants à cet amendement, la notion de « phase avancée ou terminale » reste floue. Ils regrettent surtout la disparition de l'expression « pronostic vital ». « L'aide à mourir ne peut s'envisager qu'en fin de vie », a estimé le rapporteur Renaissance Didier Martin. « On n'est plus du tout dans la même loi (...). Ce n'est pas l'équilibre de la loi qui a été souhaitée », a regretté la présidente de la commission Agnès Firmin Le Bodo, qui a participé à la rédaction du projet de loi lorsqu'elle était ministre. La députée LR Annie Genevard a fait part de sa « sidération » après la suppression de ce « verrou essentiel ». Elle et plusieurs députés craignent d'autres élargissements de la loi au cours des discussions à venir.
Olivier Falorni a tenté de rassurer les opposants à cette modification, rappelant qu'un autre critère exigé par la loi était que le malade souffre d'une maladie « grave et incurable ». « Grave et incurable définit que votre pronostic vital non seulement est engagé mais il est même sérieusement, très sérieusement engagé. Et la phase avancée ou terminale renforce ce dispositif », a-t-il soutenu.
Le profil de tiers précisé
Autre modification du texte initial : les députés ont restreint le périmètre des personnes tierces autorisées à administrer la substance létale. Elles devront être majeures et ne percevoir « aucune rémunération ou gratification » en contrepartie. Les débats ont longuement porté sur le rôle des « médecins et infirmiers », autorisés à administrer la substance sous réserve d’une clause de conscience. De nombreux députés se sont aussi opposés - sans succès - au recours à un proche, mettant en avant de potentielles pressions et conséquences psychologiques. « Nous considérons plus juste de laisser le choix de la modalité à la personne malade », a au contraire défendu la vice-présidente de la commission Marie-Noëlle Battistel (PS).
Plus largement, le terme « aide à mourir » lui-même a été attaqué par les opposants au texte, lui préférant les expressions « suicide assisté » et « euthanasie ». Selon eux, les termes du texte manquent de clarté et euphémisent l'acte. Le député RN Hervé de Lépinau est allé jusqu'à dénoncer « la légalisation d'un homicide », quand Pierre Dharréville (PCF) a critiqué une « rupture éthique, sociale, culturelle ».
Plus tôt dans la semaine, les députés ont modifié les dispositions concernant les soins palliatifs, permettant aux patients de laisser des directives anticipées sur leurs choix en cas de perte de conscience irréversible. Les directives seront systématiquement conservées dans le dossier médical partagé. La commission a adopté un amendement du député Jérôme Guedj (PS) en faveur d'une répartition des soins d'accompagnement qui « garanti(sse) un accès équitable aux personnes malades ». Et un autre du LR Thibault Bazin visant à créer un « droit opposable » à bénéficier de soins palliatifs.
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