Entre 1990 et 2023, le nombre de nouveaux cas de cancers cutanés a plus que triplé dans l’Hexagone. Selon Santé publique France, entre 141 200 et 243 500 nouveaux cas de cancers de la peau sont recensés chaque année. Environ 70 % de ces cancers sont des carcinomes basocellulaires, 20 % des carcinomes épidermoïdes et 10 % des mélanomes, selon l’INCa.
Parallèlement, les effectifs de dermatologues ont fondu de plus de 25 % en vingt ans. Au 1er janvier 2023, la Société française de dermatologie (SFD) recensait seulement 2 798 dermatologues en activité contre plus de 3 500 en 2007. « Dans ce contexte, on se dit évidemment que les outils d’intelligence artificielle peuvent nous aider à prioriser et optimiser le parcours de soins (…) c’est une assistance qui augmente notre performance même s’il faut voir le patient en aval », a analysé, lors des récentes rencontres de la dermatologie-vénéréologie, la Dr Jilliana Monnier, dermatologue à l’AP-HM (Chu de Marseille), elle-même utilisatrice de plusieurs solutions d’IA dans sa spécialité.
Les entreprises n’ont pas attendu pour se lancer dans le développement de solutions innovantes pour aider les dermatologues au quotidien ou épauler les confrères généralistes face aux cancers de la peau, notamment avec l’essor de la télé-expertise. Mais c’est désormais surtout l’avènement de l’IA qui ouvre des perspectives en matière de diagnostic et de traitement.
Notre IA a été entraînée sur plus de 600 000 images de carcinomes basocellulaires
Maxime Cazalas, directeur clinique de Damae Medical
La start-up française Damae Medical, spécialisée dans les cancers de la peau, a développé un appareil d'imagerie portable dopé à l’IA, baptisé DeepLive, qui permet une visualisation 3D non invasive et instantanée des tissus de la peau. « Le dermatologue positionne une petite sonde sur la peau du patient ce qui va lui permettre d’avoir en temps réel une image des structures cellulaires de l’épiderme, c’est une sorte de biopsie optique réalisée sans prélèvement invasif », explique Maxime Cazalas, directeur clinique de l’entreprise fondée il y a une dizaine d’années. En un seul rendez-vous, le spécialiste est capable de poser un diagnostic microscopique précis et de mettre en place un traitement en cas de lésion maligne, sans avoir eu recours à une biopsie cutanée classique. Ce diagnostic précoce raccourcit les délais et optimise la prise en charge. « Le praticien pourra directement prescrire un traitement topique ou planifier une chirurgie, on évite de longues semaines d’attente », souligne l’ingénieur de formation.
Pour atteindre un niveau élevé de précision diagnostique (96 %), des modules d’intelligence artificielle ont été ajoutés au dispositif d’imagerie 3D. « Notre IA a été entraînée sur plus de 600 000 images de carcinomes basocellulaires, la sonde va mettre en évidence les zones suspectes à l’aide d’un code couleur et va donner un score de probabilité de cancer de 0 à 100 % », précise Maxime Cazalas. Au-delà du diagnostic, cette solution doit permettre de suivre le traitement et de guider l’acte chirurgical éventuel, de façon à éviter des réopérations ou des risques de récurrence.
Ayant bénéficié notamment du soutien de Bpifrance, le dispositif doté du marquage CE est aujourd’hui utilisé dans plusieurs dizaines d'établissements, principalement en France, en Allemagne et en Italie. Dans l’Hexagone, une quinzaine de centres, dont les CHU de Saint-Étienne ou de Nantes et plusieurs hôpitaux de l'AP-HP (Ambroise-Paré, Saint-Louis, Avicenne) ont adopté cette technologie. Une étude médico-économique d’ampleur – impliquant 700 patients dans 10 centres – est en cours visant à démontrer, au-delà de la précision diagnostique, l’impact organisationnel et financier de cette innovation de rupture. La société ambitionne d’étendre son usage en libéral et vise le remboursement. « En Allemagne, de nombreux libéraux utilisent notre solution car la barrière de l’IA a été levée », avance Maxime Cazalas. Le coût de l’appareil avec ses options et le service est estimé à 200 000 euros.
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