L'assurance maladie dans son rapport annuel charges et produits se livre à une opération de fact checking. La France contrairement à ce qui s'écrit ne serait pas le mauvais élève de la classe européenne en matière d'accès aux innovations pharmaceutiques. Afin de lutter contre ces idées reçues, l'institution a mené une étude portant sur une comparaison internationale des délais d'accès à douze molécules innovantes dans quatre pays, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et la France. Contre toute attente, l'Hexagone se classe au second rang juste derrière l'Allemagne. Ce résultat flatteur s'expliquerait surtout par le recours aux dispositifs d'accès précoces.
Méthodologie différente
Mais avant de présenter ses propres données, l'assurance maladie réfute les conclusions des études menées notamment par l'industrie pharma européenne en pointant des différences majeures en matière de méthodologie. Ce qui limiterait ensuite l'intérêt de l'interprétation. D'où la mise en œuvre de sa propre enquête. Trois étapes ont d'abord été retenues par les auteurs de l'étude, à savoir « la date du premier accès via un programme d’accès précoce, la date de publication de l'évaluation et la date de décision de remboursement (après négociation et tarification pour l'Espagne, la France et l'Italie) ». Bien sûr, le critère retenu influe sur le résultat. Si l'on retient comme paramètre le délai d'accès au marché, la France détient bien le bonnet d'âne avec une moyenne de 865 jours, loin derrière l'Espagne (388) et l'Italie (372). Ce retard français s'expliquerait par le feuilleton des longues négociations qui ont émaillé le parcours de produits comme Entresto®, Orkambi®, Tagresso®, Darzalex®*. L'Allemagne sur ce critère est hors d'atteinte avec une moyenne de 54 jours. De l'autre côté du Rhin, les médicaments sont pris en charge dès l'obtention de leur AMM.
169 jours pour la France
Pour l'assurance maladie, ce critère toutefois ne procure pas une vision précise de la réalité. Il faut plutôt lui substituer le moment où le médicament devient disponible pour les patients, « que cette mise à disposition relève d'un cadre commun ou d'un cadre dérogatoire ». Grâce aux dispositifs des ATU puis celui de l'accès précoce instauré en 2021, la situation s'éclaire pour la France. Elle se place alors au second rang, toujours derrière l'Allemagne mais avec une moyenne qui se contracte désormais à 169 jours. Bref, il serait licite de changer d'instrument de mesure afin de mieux rendre compte des approches adoptées selon les pays pour mettre à disposition des patients les innovations thérapeutiques mageures. L'assurance maladie appelle à la poursuite de ce travail en proposant la création d'« un observatoire sur les délais d'accès aux médicaments innovants, à l'échelle européenne, en coopération avec les institutions chargées du médicament dans les pays voisins ». On s'étonnera toutefois de l'absence du Royaume-Uni dans cette première étude. À suivre.
* Au total, 12 médicaments : Darzalex ®, Keytruda®, Opdivo®, Ibrance®, Tagrisso®, Orkambi®, Dupixent®, Hemlibra®, Maviret®, Praluent®, Repetha®, Entresto ®.
À la mémoire de notre consœur et amie
Dérives sectaires : une hausse préoccupante dans le secteur de la santé
Protection de l’enfance : Catherine Vautrin affiche ses ambitions pour une « nouvelle impulsion »
Dr Joëlle Belaïsch-Allart : « S’il faut respecter le non-désir d’enfant, le renoncement à la parentalité doit interpeller »