« Tous unis face au mépris », pouvait-on lire, ce mardi 14 février, sur une large banderole placée en tête de cortège de la manifestation et tenue par l'ensemble des représentants de médecins – du président du Conseil national de l'Ordre des médecins, le Dr François Arnault, jusqu'aux présidents des différentes organisations syndicales de médecins (MG France, CSMF, UFML-S, SML, FMF), en passant par le Pr Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale (CMG).
Une union rare et qualifiée « d'historique » pour protester contre la proposition de loi (PPL) Rist qui prévoit un accès direct (sans prescription médicale) à certains paramédicaux.
Front commun
« Cette loi revient à mépriser notre formation, notre exercice et notre engagement auprès des patients par la création dangereuse d’officiers de santé à la formation médicale parcellaire (...). Elle risque de creuser les inégalités de soin entre les Français et légaliser la perte de chance », a dénoncé le Dr Jérôme Marty devant les manifestants.
« On ne se laissera pas faire ! » a insufflé à la foule le Dr Corinne le Sauder, la présidente de la FMF rappelant que la « PPL Valletoux de la honte » venait d'être retirée, signe que les médecins sont entendus. « Cette loi est extrêmement délétère et dangereuse pour notre système de santé, a, à son tour, estimé le Dr Sophie Bauer, présidente du SML, avertissant d'ailleurs que de « nouvelles actions » seraient entreprises en cas de non-retrait du texte.
Après les discours des différents représentants syndicaux, le cortège comptant plusieurs milliers de manifestants (10 000 selon les syndicats), s'est élancé de la place Vauban, tout près du ministère de la Santé, pour rejoindre le Panthéon, près du Sénat, aux alentours de 16 h 30.
La manifestation, qui a réuni également les médecins remplaçants de ReAGJIR, les internes de l'Isni et de l'Isnar-IMG, les médecins de l'association SOS médecins et de Médecins pour demain ainsi que les hospitaliers, a été rythmée par de nombreux chants et slogans. « À vos Rist et périls » ont scandé certains. « Macron écoute nos solutions », ont scandé d'autres. « Les patients avec nous, la santé est en danger ! », pouvait-on également entendre.
Dans la foule de manifestants, des médecins des quatre coins de la France sont venus spécialement pour l'occasion, à l'instar du Dr Stéphanie Fezzoli Briard, médecin de famille depuis 18 ans, qui s'est dit « humiliée » par la PPL Rist.
« Ce texte est un mépris de la profession, une non-reconnaissance de notre travail ! Il signe tristement l'arrêt de mort des médecins dans le parcours de soins des patients ! » dénonce la généraliste déguisée en faucheuse.
Un peu plus tôt dans la journée, le ministre de la Santé, François Braun, a tenté de désamorcer un peu la colère qui anime en ce moment les médecins en affirmant que cette réforme visait à leur « donner plus de temps de soin ». « Je comprends leur inquiétude, pas leur hostilité », a-t-il toutefois souligné sur France info.
Des revendications également tarifaires
Si l'objet principal de la manifestation était bel et bien la PPL Rist, débattue au même moment au Sénat, les revendications des médecins sont plus larges, comme l'indique le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes CSMF :
« Nous sommes aussi là pour demander au gouvernement, et à l'Assurance maladie, de nous donner les moyens de mieux prendre en charge la population. Il est pour nous inacceptable d'avoir encore 650 000 patients en ALD sans médecin traitant. Nous souhaitons avoir les moyens, au travers de notre activité et de nos consultations, de pouvoir salarier un assistant médical. Et ce n'est pas avec une consultation à 26,50 euros qu'on peut embaucher des assistants médicaux (...). Nous réclamons par ailleurs les consultations longues et complexes à 60 euros de façon à ce que les jeunes aient encore envie demain d'être médecin traitant ».
Pour l'instant, l'Assurance maladie a avancé l'idée d'une hausse d'1,50 euros de la consultation de base. Mais cette annonce a été vécue comme une « une provocation » par la majorité des généralistes. Les prochaines séances bilatérales repoussées par la Cnam à ce jeudi devraient être décisives pour les médecins…
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