Dans un référé rendu public aujourd’hui, la Cour des comptes dénonce « des pratiques de prescription et de dispensations [des antibiotiques] inflationnistes » et appelle la ministre de la santé à « mettre en œuvre de manière plus directive une palette de mesures visant à réduire la consommation d’antibiotiques et à en garantir l’effectivité en utilisant l’instrument de la ROSP ».
Pour les magistrats de la rue Cambon, « les deux derniers plans antibiotiques fondés sur la pédagogie et l’autorégulation des professionnels de santé se sont soldés par un échec » avec des consommations reparties à la hausse depuis 2005, notamment en ville.
En cause, selon eux : un recours encore excessif aux antibiotiques de la part des médecins lié notamment à une sous-utilisation des TROD- mais aussi des prescriptions jugées trop approximatives dans le choix des molécules ou les durées de traitement. « En 2015, les prescriptions dont la durée était comprise entre huit et dix jours représentaient 22 % de celles-ci, alors même qu’une durée supérieure à sept jours est dans la plupart des cas non pertinente », critique la Cour des comptes.
Le référé pointe aussi « un mode de dispensation par boîte qui amplifie le mésusage » et de fortes disparités inter-régionales dans les prescriptions « que rien ne justifie ». Ainsi, « il existe un écart de plus de 25 % entre la région qui consomme le moins d’antibiotiques (Pays de la Loire) et celle qui en consomme le plus (Hauts-de-France) ».
Enfin, « le conseil en antibiothérapie n’est pas structuré, en dehors d’expérimentations dans quelques régions, alors que la pratique isolée de la prescription est souvent à l’origine de prescriptions inappropriées ».
Vérification des prescriptions
Forte de ces constats, la cour des comptes enjoint le gouvernement à davantage de fermeté, pour pousser, par le biais de la ROSP notamment, différentes mesures comme la formation continue obligatoire des médecins ou le recours au logiciel d’aide à la prescription. Ces derniers « sont trop peu utilisés par les médecins de ville. Leur systématisation et leur généralisation devraient être une priorité, à tout le moins pour éviter le recours en première intention à des antibiotiques dits critiques ».
Les sages vont même jusqu’à prôner « la vérification croisée des prescriptions des antibiotiques des médecins généralistes par les médecins coordonnateurs des EHPAD ».
Des injonctions qui risquent de rester, du moins pour partie, lettre morte si l’on en croit la réponse faite par Agnès Buzyn au président de la cour des comptes. La ministre rappelle en préalable que la préservation de l'efficacité des antibiotiques « figure parmi les objectifs définis dans la Stratégie Nationale de Santé fixée dès 2017 ».
Quant à faire jouer le levier de la ROSP, « il a déjà été ajouté en 2016 un deuxième indicateur de bonne prescription des antibiotiques ainsi qu’un indicateur spécifique aux prescriptions pédiatriques, souligne la ministre, et à ce stade il ne me paraît pas souhaitable d’en ajouter de nouveaux ».
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