Cette fois, l’édifice se dessine. Après des mois, voire des années, de tâtonnements, faute de cadrage, la certification périodique – instaurée par une ordonnance du 19 juillet 2021 – devient plus nette, à la faveur d’un premier décret d’application publié le 24 mars mais aussi d’un intérêt croissant des praticiens, comme l’a illustré le récent congrès de la médecine générale (CMGF) en y consacrant une session. La procédure est officiellement entrée en vigueur au 1er janvier 2023.
Certains paramètres étaient connus. Tous les professionnels libéraux comme hospitaliers et salariés qui disposent d’un Ordre national (médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmières, kinés, pédicures-podologues) devront se soumettre à cette obligation et réaliser au cours d'une période de six ans pour les nouveaux diplômés – neuf ans par dérogation pour ceux déjà en exercice en janvier 2023 – « un programme minimal d'actions » autour de quatre blocs distincts : le maintien des connaissances et compétences, la qualité des pratiques, la relation avec les patients et la santé personnelle du praticien. Le décret publié il y a quelques jours précise qu’il faudra attester avoir réalisé sur la période de six ans « au moins deux actions » pour chacun des blocs (objectifs) qui constituent le socle de la certification. Côté instances, il revient au Conseil national de la certification périodique (CNCP*), désormais présidé par Nadiège Baille – nommée le 8 mars – de définir la stratégie, le déploiement et la promotion de cette nouvelle obligation. Voilà pour les principes…
« La certification n’est en aucun cas un test de connaissances
Paul Frappé, président du Collège de la médecine générale (CMG)
Chevilles ouvrières du dispositif, les conseils nationaux professionnels (CNP) sont très mobilisés pour élaborer d’ici au mois de juin les fameux « référentiels » de certification qui permettront à chaque professionnel de se projeter sur les actions, la Haute Autorité de santé (HAS) fixant le cadre méthodologique. Et de ce point de vue, les choses avancent plus ou moins vite, sous la houlette du Collège de la médecine générale (CMG) – dont le projet de référentiel déjà finalisé est en attente de validation à la DGOS – et de la Fédération des spécialités médicales (FSM) pour les autres spécialités. En tout état de cause, les actions menées depuis janvier 2023 pourront être intégrées dans les futurs comptes individuels…
S’agissant par exemple de l’actualisation des connaissances et des compétences, le projet de référentiel de médecine générale retient les formations de l’Agence nationale du DPC et du Fonds d’assurance formation (FAF), celles délivrées par des organismes reconnus, mais également les formations certifiantes (DU, DIU). Les journées, colloques et conférences scientifiques, les rencontres institutionnelles, les tutorats ou la maîtrise de stage mais aussi les revues bibliographiques, le journal club et les tests de lecture d’une revue médicale devraient également pouvoir être éligibles pour la validation.
La participation à une réunion de concertation pluridisciplinaire, à un audit clinique, la contribution à un registre, un groupe d'analyse de pratiques sont aussi cités. Le décret publié mentionne par ailleurs l’engagement dans des protocoles de coopération, le développement de compétences transversales pour améliorer les parcours de santé ou développer la prévention en santé. Le choix sera donc vaste et varié, l’objectif étant de conserver de la souplesse. « La certification n’est en aucun cas un test de connaissances. Je la qualifie de dispositif qui a du sens et qui est réclamé socialement », souligne le Pr Paul Frappé, président du CMG. À noter que l’obligation triennale de DPC ne disparaît pas.
Dans l’attente des comptes individuels
Ancien président de la Fédération des spécialités médicales (FSM), le Pr Olivier Goëau-Brissonnière regrette toutefois le retard pris dans la publication des derniers décrets, sans oublier quelques points de blocage. « Malgré nos échanges avec la DGOS, des incertitudes persistent sur la granularité des actions, la mise à jour au fil de l’eau des référentiels par les CNP, sur la plateforme de l’Agence du numérique en santé (ANS). Nous demandons également que les éléments des programmes d’accréditation pour les spécialités à risque soient en adéquation avec le référentiel. » Le Pr Goëau-Brissonnière plaide aussi pour que les CNP puissent aider les professionnels afin d’adapter le référentiel à un exercice particulier.
Cheffe de projet certification périodique à la DGOS, Marie-Laure Bellengier assure que le chantier va se poursuivre, brique par brique. « D’autres décrets seront nécessaires, relatifs aux comptes individuels de certification hébergés par l’ANS ou aux modalités de contrôle de la certification par les Ordres », a-t-elle précisé lors de la session du CMGF consacrée à la certification. Un dernier point que la Dr Élisabeth Gormand, vice-présidente de la section formation et compétences médicales de l’Ordre, a souhaité illustrer. « L’Ordre enregistrera les comptes individuels, validera les actions et il entrera en contact avec les médecins avant l’échéance des six ans afin de les inciter à satisfaire à leur obligation de certification, précise-t-elle. Nous accompagnerons ceux qui sont en difficulté, pour diverses raisons, avant de prononcer des sanctions en chambre disciplinaire ». Sur le papier, et même si ce n’est pas l’esprit de cette démarche, la sanction pourrait aller jusqu’à l’interdiction d’exercice.
L’instance de certification associe notamment les syndicats, Ordres, CNP, personnalités qualifiées ou encore associations de patients.
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier