Face à la multiplication des applications d'intelligence artificielle (IA) pour le dépistage en temps réel de lésions cutanées, la Société française de dermatologie de France (SFD) veut se doter de moyens pour encadrer son utilisation.
Si de telles applications permettent en effet d'améliorer « la fiabilité du diagnostic dermatologique et de faciliter l’accès de la population à cette expertise », elles doivent être encadrées « afin d'éviter les dérives et le mésusage », insiste la société savante dans un communiqué* publié le 21 septembre.
Risques et dérives de l'IA
En effet, l'utilisation d'applications d'intelligence artificielle présente des risques, notamment pour les usagers si ceux-ci ne sont pas accompagnés par du personnel médical.
Par exemple, « lorsque le/la patient(e) est confronté(e) à un diagnostic potentiellement grave, grain de beauté à risque élevé de mélanome » cela peut susciter « chez lui/elle angoisse et/ou détresse alors que l’IA n’est pas en mesure de répondre à ses interrogations », prévient la société savante.
« Cette situation va à l’encontre du dispositif mis en place en 2006 par la HAS : la « consultation d’annonce », temps d’échanges et d’explications sur la maladie et son traitement entre patient(e) et professionnel de santé », ajoute-t-elle.
Autre risque soulevé par la SFD ? La réduction de l’analyse clinique des lésions cutanées à celle de leur image photographique, « en dehors de tout contexte clinique ».
L'association qui regroupe des médecins et dermatologues experts rappelle ainsi que « l’interrogatoire et l’examen clinique de TOUTE la peau sont en effet indispensables et indissociables du diagnostic de la lésion dermatologique ».
La société savante souligne par ailleurs le « problème de la responsabilité médicale » que pose l'IA. « En effet, qui endosse la responsabilité du diagnostic en cas de recours direct par le patient à un outil d’IA ? Et qu’en est-il de l’intervention d’un médecin dont la décision se fonde sur le résultat de l’IA ? », s'interroge-t-elle.
« La captation des données personnelles et médicales d’un(e) patient(e) par un tiers non-médecin » pose aussi question au regroupement d'experts.
Former les généralistes à l'usage de l'IA
Pour la SFD, « le sens clinique – notamment la capacité à formuler une hypothèse diagnostique – ne doit pas être complètement abandonné à la machine (...) Au vu des produits commercialisés, la SFD (tient) à rappeler que l’accompagnement humain par un professionnel de santé est essentiel. ».
Pour éviter les dérives liées à l'utilisation de l'IA et les risques qu'elle implique, la société savante entend « promouvoir » son usage en premiers recours auprès des médecins généralistes.
« Cela permettrait d’améliorer le parcours de soins coordonné des patients : limitation du recours à l’avis spécialisé si cela n’est pas nécessaire ou au contraire, avis rapide auprès d’un dermatologue si suspicion de mélanome, par exemple », écrit-elle.
Pour former les généralistes, la SFD et le Teldes (son groupe de télédermatologie), envisagent de déployer un comité de surveillance « pour concevoir et réaliser la formation des dermatologues, des médecins généralistes et professionnels de santé aux pratiques de l’IA en dermatologie ».
La société savante invite enfin les autorités de santé à clarifier le cadre réglementaire d'utilisation de l'IA et appelle à réguler « certaines pratiques non souhaitables ».
*Le communiqué de presse a été réalisé par la Société française de dermatologie (SFD) « à l’initiative de son Groupe Télédermatologie et e-santé (Teldes) et avec la participation du Groupe de réflexion éthique (GéD) ».
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