L'interruption volontaire de grossesse (IVG) constitue, depuis près de 45 ans, un droit des femmes à part entière qui ne peut en aucune manière être remis en question, quel qu'en soit le motif. Dans les pays où elle est illégale, les femmes en meurent. Elle s'exerce avec l'aide pratique des gynécologues-obstétriciens, gynécologues médicaux, médecins généralistes et sages-femmes pour l'IVG médicamenteuse. Cette prise en charge s'effectue dans le respect de la clause de conscience inhérente à tous les actes médicaux et, en France, son respect n'obère en rien le droit des femmes à disposer de leur corps.
Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) a édicté des recommandations pour la pratique clinique de l'IVG en 2016 qui constituent désormais la référence dans ce domaine. Réunissant des praticiens d'exercice libéral et public, le CNGOF est attaché à la continuité des soins pour les femmes et à la disponibilité des équipes pour assurer, dans le confort et la sérénité, une prise en charge de qualité, tant sur le plan physique que psychologique.
Deux tendances nettes se dessinent actuellement :
• Une stagnation, voire une diminution du recours à l'IVG dans certaines tranches d'âge depuis 3 ans, témoignant probablement d'une plus large utilisation des contraceptions réversibles de longue durée, qui améliorent nettement l'observance.
• Une augmentation constante de l'IVG médicamenteuse et ambulatoire avec un respect grandissant du souhait des femmes, mieux informées par les médecins sollicités, qui suivent leurs demandes dans la plupart des institutions.
Le taux général d'IVG, de 14 ‰, reste cependant élevé, dont 15 000 chaque année chez des mineures. Cela doit inciter le corps médical et les pouvoirs publics à intensifier la disponibilité et la prise en charge de la contraception. Les disparités régionales restent importantes, ce qui devrait permettre de mieux cibler les territoires où des progrès restent à faire. L'implication nouvelle des étudiants en médecine – à condition de les former correctement – constitue une piste indéniable d'amélioration.
Information à la vie affective et sexuelle… avant l'adolescence
La grande absente de ce tableau demeure l'information à la vie affective et sexuelle. Nonobstant la loi de 2001, qui l'impose chaque année dès les petites classes, de très nombreux établissements scolaires n'ont ni les ressources humaines, ni la motivation pour aborder devant les élèves ces sujets qui les concerneront pourtant pendant toute leur vie d'adultes.
Que l'IVG puisse être le résultat d'une conduite à risques, attribut immémorial de l'adolescence, n'émeut point, d'autant que ce n'est pas le plus grand des risques encourus à cette période de la vie. Qu'en revanche, elle survienne par défaut d'information sur le corps et sa physiologie – alors même que tout le monde s'imagine que les jeunes sont plus que bien informés (ce qui est bien sûr faux) –, voilà qui est dommage !
Le rôle de l'école est donc ici incontournable. Le grand progrès que pourrait effectuer notre pays serait d'imposer que des adultes correctement formés abordent les sujets de sexualité sans tabou et sans attendre la puberté, période durant laquelle cette parole est trop tardive. Faut-il préciser que les cours sur la reproduction, qui sont déjà fort bien faits par les professeurs de sciences de la vie et de la terre (SVT), ne peuvent s'y substituer ?
Le parcours de l'IVG en début de vie sexuelle reste pour certaines jeunes femmes une véritable épreuve, susceptible de laisser des traces. Il s'agit là d'une autre inégalité entre femmes et hommes dont on n'évoque que rarement l'injustice. On ne peut donc pas considérer l'IVG comme une simple contraception et la meilleure demeure celle qu'on a pu prévenir.
Tous les services publics de gynécologie obstétrique ainsi que de nombreux spécialistes d'exercice libéral et les sages-femmes ont à cœur de contribuer à ce que les femmes puissent mieux maîtriser leur fécondité. À charge aux ARS et à l'Éducation nationale d'organiser cette information comme un véritable programme de santé primaire.
Président du CNGOF, CHRU Strasbourg
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