Les candidats à la présidentielle enchaînent en ce moment les grands oraux. La semaine dernière ce sont six candidats qui se sont prêtés à l’exercice spécifiquement sur le volet santé de leur programme. Lors de cette journée organisée par la Fédération hospitalière de France (FHF) les cinq prétendants à l’Élysée (et Olivier Véran pour représenter Emmanuel Macron) ont présenté les grandes lignes de leur programme santé. Ils ont ensuite confronté leurs idées aux questions des professionnels de santé présents à distance et dans la salle sur diverses thématiques. Le Généraliste en a retenu une par candidat.
Anne Hidalgo (Parti socialiste) : une 4e année d’internat pour les déserts
La candidate socialiste a été interrogée par une généraliste de Mûrs-Erigné (Maine-et-Loire) sur ses mesures pour soutenir les médecins libéraux en exercice et encourager les jeunes à s’installer. L’occasion pour la maire de Paris de développer sa proposition de 4e année d’internat dans les déserts.
« Il nous faut accompagner l’installation. Je ne veux pas aller aujourd’hui vers un système d’obligation. Je sais que ce n’est pas comme ça que cela peut marcher. Mais je veux, au lendemain de l’élection, une discussion avec les organisations de professionnels de santé, car il nous faut quand même des objectifs. Pour cela, je mets les moyens et, ces moyens, c’est cette quatrième année d’internat, qui devient une année de professionnalisation. Les jeunes iront la faire dans les déserts médicaux, accompagnés par les départements et avec une rémunération double de celle d’aujourd’hui. Dès 2022, dès la première année, nous pouvons avoir 4 000 jeunes qui vont dans les déserts médicaux. Et parallèlement, il faut plus de médecins, donc 15 000 formés par an pendant le quinquennat. »
Emmanuel Macron (En Marche) : une convention citoyenne pour la fin de vie
Quelques heures avant la présentation officielle de son programme, Emmanuel Macron était représenté au Grand Oral par l’actuel ministre de la Santé Olivier Véran. Ce dernier a essentiellement présenté le bilan santé du quinquennat. Interrogé sur les innovations prévues en matière de fin de vie, il y a répondu par l’évocation d’une convention citoyenne. Une information confirmée dans l’après-midi par Emmanuel Macron.
« Le président, lors de ses précédentes interventions sur cette question, avait fait état de la possibilité de mettre en place une convention citoyenne. Il est certain que les questions de fin de vie traversent la société française depuis des années. Il y a en général une loi tous les 5 à 10 ans, la dernière étant la loi Clayes-Léonetti. Il faut que nous soyons capables de préciser les conditions du débat et de savoir de quoi on parle : suicide assisté ? euthanasie dite active ? Aujourd’hui nous avons une mise en coma profond prolongé, avec arrêt de l’alimentation et de l’hydratation. Certains plaident pour qu’il puisse y avoir l’injection d’une dose létale pour accélérer la fin de vie, d’autres préfèrent travailler la question du suicide assisté. En tout cas, c'est une question pour laquelle il n'y a pas de position morale à avoir. Il n’y a pas une société plus en avance par rapport aux autres et il y a déjà des gros travaux qui sont faits par des parlementaires sur ces sujets. »
Yannick Jadot (Europe Écologie-Les Verts) : pas de nouveaux Ehpad à but lucratif
Le candidat a été interrogé par une aide médico-psychologique travaillant en Ehpad sur ses mesures afin de garantir des soins de qualité accessibles à tous dans ces établissements. L’occasion pour le postulant écologiste de dire son intention de mettre fin au système des Ehpad privés à but lucratif.
« On savait qu’il existait dans notre pays un système de spéculation sur la perte d’autonomie. Pour ma part, j’interdirai toute nouvelle autorisation d’Ehpad à but lucratif. Cela ne signifie pas forcément la nationalisation, je pense notamment que les mutuelles ont un énorme rôle à jouer dans notre pays sur la question de la prévention, mais aussi celle de l’accompagnement dans ce type de secteur. Pour le financement de la branche autonomie, je ferai évoluer les droits de succession dans notre pays. Nous allons supprimer les dérogations qui permettent d’échapper à l’impôt sur la succession, ce qui nous permettra d’obtenir 8 à 9 milliards de recettes supplémentaires par an. Cela financera une politique d’autonomie, avec pour objectif de garder au maximum les personnes à la maison. Cela permettra aussi d’avoir des Ehpad où l’on traite correctement nos aînés avec un taux d’accompagnement plus aligné avec ce qui se fait dans les pays du nord de l’Europe. »
Valérie Pécresse (Les Républicains) : créer un institut national de la santé mentale
La candidate de droite a été interpellée par une psychiatre des Hauts-de-France sur ses propositions pour la psychiatrie et la santé mentale. La présidente de la région Île-de-France a affirmé qu’elle voulait faire de la santé mentale une des grandes causes du prochain quinquennat.
« Je ferai de la santé mentale une des grandes causes de santé du prochain quinquennat. Dans toutes les spécialités médicales, elle doit aussi être une priorité. Pour avoir une stratégie ambitieuse, je reprendrai l’idée mise en place pour le cancer avec l’Inca par Jacques Chirac et je créerai un institut national de la santé mentale. L’idée est d’avoir une stratégie de soins d’accompagnement du patient, mais aussi de booster l’innovation et la recherche thérapeutique sur les maladies mentales. Cet institut définira les priorités stratégiques, coordonnera l’action des acteurs et soutiendra l’effort de recherche. Il faudra augmenter le nombre de praticiens formés et développer notamment la branche de pédopsychiatrie. Je remplacerai les COP (conseillers d’orientation psychologue), présents dans les collèges et lycées, par de vrais psychologues. Il faudra aussi aider les généralistes à mieux se former pour repérer les troubles anxieux et accompagner les patients dans l’orientation du système. Il faut aussi travailler à la destigmatisation des patients en santé mentale. »
Marine Le Pen (Rassemblement national) : la suppression des ARS
La candidate du Rassemblement national a notamment été interrogée par un représentant des usagers sur la manière de faire exister la démocratie en santé à l’échelle de la médecine de proximité. L’occasion pour la leader d'extrême droite d’expliquer sa vision du futur système de gouvernance en santé, qui passe notamment par la suppression des Agences régionales de santé (ARS).
« Il faut faire de place aux patients. Et la région est une échelle trop vaste c’est pour cela que je veux la suppression des ARS. Le niveau départemental, ou même intercommunale ou d’un bassin de vie, permet de répondre aux préoccupations. Je suis pour la déconcentration. Quand vous avez un préfet, il reste le représentant de l’état et développe la politique nationale sur les territoires. Ce n’est pas ce que j’ai pu observer avec les ARS pendant la crise. Chaque patron d’ARS avait son petit avis, considérait que sa stratégie était la bonne contrairement à celle du voisin. Certaines décisions étaient acceptées par les ARS, d’autres non. Tout ça est très lourd et coûte une fortune. Quand on voit la manière donc fonctionne les ARS, je crois que nous n’aurons aucun regret à les voir disparaître. L’intérêt du préfet est qu’il est un coordinateur, il porte une politique nationale mais il coordonne les professionnels de santé, les représentants des patients etc. »
Fabien Roussel (Parti communiste français) : rétablir les CHSCT
Interpellé par Mathilde Renker, présidente du syndicat des internes de médecine générale (Isnar-IMG) sur les conditions de travail des futurs médecins et ses propositions pour la santé au travail, le candidat communiste a redit son intention de revenir sur les lois ayant supprimé les CHSCT.
« C’est terrible de se dire qu’on interroge les candidats à la présidentielle pour savoir comment ils vont soigner les soignants et futurs soignants. Peut-être qu’avant il fallait en passer par là, ces conditions de travail déplorables. Peut-être que cela faisait partie du récit à raconter pour devenir médecin, il fallait que ce soit dur. Mais peut-être qu’aujourd'hui il faut changer d’époque et respecter un peu plus l’être humain, y compris dans l’apprentissage et l’éducation. Il faut mieux protéger les jeunes médecins dans le cadre de leur formation, avec une médecine du travail à l’écoute pour les accompagner et un système de garde modifié. Sur la santé au travail, la loi travail et les ordonnances Macron ont supprimé les CHSCT et les lieux où dans les entreprises et les hôpitaux justement, on prend en compte la sécurité des salariés. Je veux donc abroger ces lois et rétablir les CHSCT et ses lieux qui permettent de prendre soin de la sécurité de tous. »
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