C’est une avancée majeure pour la protection des professionnels santé. L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité une proposition de loi (PPL) portée par Philippe Pradal (Horizons) dans le cadre de la niche parlementaire dédiée à son groupe. Celle-ci s’inspire du plan de 42 mesures, présenté en septembre 2023, imaginées par l’ancienne ministre Agnès Firmin Le Bodo, qui a depuis retrouvé sa place de députée.
Cette PPL s’inscrit dans un contexte où les soignants sont de plus en plus menacés, comme le rappelle à la tribune l’actuel ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux. « Chaque année, plus de 20 000 signalements sont recensés, pour environ 30 000 atteintes aux personnes et 5 000 atteintes aux biens ». L’Ordre des médecins, qui recueille les déclarations des libéraux, a lui constaté « en 2023 une hausse de 21 % en un an des agressions et des actes de violence ». Dans les établissements enfin, « plus de 30 000 professionnels sont agressés chaque année, dont 45 % d’infirmiers », indique-t-il. Avant de clamer avec force : « La tolérance zéro est non négociable. »
Favoriser le dépôt de plainte des soignants
Mesure phare du texte, l’article 3 ouvre la possibilité à « l’employeur » d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé ayant subi des violences, à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou en raison de ses fonctions, de déposer plainte à sa place, après avoir recueilli son « consentement écrit ». Une disposition primordiale, qui correspond à une demande des soignants.
Contacté, le rapporteur du texte, Philippe Pradal, indique au Quotidien que cette mesure concerne également les professionnels libéraux – dont les médecins – exerçant en cabinet isolé. S’ils n’ont effectivement pas d’employeur, ce pourrait être une institution représentative – l’Ordre, les syndicats professionnels ou les URPS – qui portent plainte à leur place, grâce à un décret, en cours d’élaboration avec Ségur.
« Il existe une diversité de solutions, qui dépendent du maillage territorial. Il faut trouver une solution pour chaque professionnel. De façon à ce que, peu importe où, s’il est agressé et qu’il n’a pas la possibilité ou l’envie de porter plainte, avec son accord, quelqu’un le fasse à sa place », explique-t-il.
Et pour les soignants qui n’osent pas porter plainte par peur de représailles et/ou de révélation de leur adresse personnelle, mais qui veulent le faire en leur nom, un amendement porté par Astrid Panosyan-Bouvet (Renaissance) leur permettra de déclarer comme domicile l’adresse de l’Ordre professionnel au tableau duquel il est inscrit – ou du commissariat ou de la brigade de gendarmerie locale.
Durcissements pour les vols et outrages
Le texte voté contient également une disposition pour aggraver la sanction en cas de violences commises à l’encontre d’un professionnel de santé « ou un membre du personnel d’un établissement de santé, d’un centre de santé, d’une maison de santé, d’une maison de naissance, d’un cabinet d’exercice libéral d’une profession de santé, d’une officine de pharmacie, d’un laboratoire de biologie médicale ou d’un établissement ou service social ou médico-social ».
Une extension aussi du champ d’application des circonstances aggravantes aux vols « lorsqu'il porte sur du matériel médical ou paramédical ou lorsqu’il est commis dans un établissement de santé ». Idem, le délit d’outrage est étendu à tous les professionnels de santé et les circonstances aggravantes lorsqu’il est commis à l’intérieur des établissements mentionnés plus haut.
Le texte prévoit l’application de toutes ces dispositions aux collectivités d’outre-mer.
Rapport attendu sur les urgences
Enfin, le groupe La France Insoumise (LFI) a fait adopter un amendement pour que le gouvernement remette un rapport sur « les besoins relatifs à la protection des professionnels intervenant dans les services d’urgences », au plus tard le 1er juin 2026.
Avec la procédure accélérée, le député Philippe Pradel confie que l’examen au Sénat, puis le retour en deuxième lecture à l’Assemblée devraient « aller assez vite ».
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