« On ne change rien aux CHU », répond en substance Edouard Philippe, Premier ministre à Didier Migaud, président de la Cour des comptes. Faut-il vraiment s’en étonner ? Dans les ronds-points, lors des séances du Grand Débat, on n'a jamais exigé une réforme des CHU. Les protestations ont fusé contre la fermeture d’une maternité de proximité ou d’un service d’urgence. Mais un CHU est bien sûr au-dessus de ces contingences. Too big to fall. Certes, les magistrats de la Cour des comptes ont sonné la charge contre un « modèle fragilisé ». Et le best-of rédigé à partir de deux rapports adressés au Premier ministre relève davantage du jeu de massacre que d’un bilan équilibré. Pour autant, la réplique du Premier ministre, plaidoirie d’avocat au lieu et place du message d’un arbitrage impartial, étonne. Les magistrats de la rue Cambon ont-ils tout faux ? On espérait un nouvel avenir pour un CHU qui n’est plus dans la force de l’âge soixante-dix ans après une naissance au forceps par ordonnance. Parmi d’autres questions, faut-il conserver les trois missions -recherche-enseignement-soins-à l’horizon 2020 ? Le nombre de CHU est-il intouchable, à la manière de la vache sacrée en Inde ? Le Premier ministre à la grande fresque opte donc pour le tableau comptable. Et livre au passage des informations moins sombres que prévu. Le déficit consolidé en 2017 s’élèverait en fait à - 292 millions d’euros au lieu des - 405 millions généralement avancés. Bref, l’élite hospitalière sort largement vainqueur de son combat contre Guy Vallancien qui appelait à une réforme de fond (Voir Décision & Stratégie Santé 313). « Ma santé 2022 » fait d’ailleurs l’impasse sur cette question.
Pourquoi en effet jeter de l’huile sur le feu alors que les fédérations hospitalières dans un rare consensus ont salué la hausse des tarifs hospitaliers de 0,5 % ? Pourquoi enfin infliger une nouvelle réforme à un CHU alors que l’on n’a pas tiré toutes les leçons de la création des GHT ? Bref au lieu d’écouter les experts, le gouvernement partage dans un bel élan démocratique la volonté du peuple. On ne touche pas à une appellation d’excellence, ouverte à tous, sans restriction ou condition. La vitrine du service public hospitalier offrira jusqu’à nouvel ordre dans un même lieu toute la gamme de soins - gastro-entérite et greffes compris. Cette décision s’inscrit dans l’aménagement du territoire en France, ardente obligation. Des pays voisins en revanche spécialisent leurs équipes de pointe. Entre accessibilité et sécurité, faut-il vraiment choisir ? En attendant, l’optimisation de la qualité comme le suggère Yohan Fayet (Cf. p. 12) serait en contradiction avec l’objectif de réduire les inégalités de santé. Au pays des gilets jaunes, le propos frise l’indécence. Vite, jetons un voile pudique sur ce qui ne doit pas être vu.
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