Crack à Paris : après l'évacuation du campement de Forceval par la police, les associations demandent une réponse médicosociale

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Publié le 05/10/2022

Crédit photo : AFP

Médecins du monde, la Fédération Addiction et les acteurs de terrain ont déploré la réponse purement sécuritaire de la préfecture de Paris et du ministère de l'Intérieur face à l'évacuation du square Forceval, à Paris, occupé depuis un an par plus d'une centaine de consommateurs de crack.

Un millier de policiers a en effet commencé, ce mercredi 5 octobre à 7 heures, à démanteler le campement de Forceval. Gérald Darmanin a affirmé que l'opération prévoit de « laisser pendant plusieurs jours, plusieurs semaines, plusieurs mois s'il le faut, des centaines de policiers » à Paris, de la place Stalingrad jusqu'aux deux villes d'Aubervilliers et de Pantin, pour empêcher « la reconstitution de ces villages » de consommation de drogue « à ciel ouvert », rapporte l'AFP.

Selon le ministre de l'Intérieur, « 63 personnes ont été mises à l'abri, notamment des femmes (six au total) particulièrement vulnérables » et cinq hospitalisations d'office ont été effectuées. Quant aux personnes en situation irrégulière sur le sol national, elles sont conduites dans les centres de rétention administratifs (CRA), avant leur expulsion.

« Que pense le ministre de la Santé, M. François Braun, de ces questions de santé publique, de la santé de ces personnes ?, interroge Marie Debrus, référente technique et plaidoyer sur la réduction des risques liés aux usages de drogues à Médecins du Monde. Où sont les dispositifs supplémentaires qui auraient dû être mis en place depuis un an après le vote du projet de financement de la sécurité sociale qui prolongeait l’expérimentation des haltes soins addiction ? »

35 à 40 % de femmes

Après avoir été expulsés de la place Stalingrad, du Jardin d'Éole, puis d'un tunnel de la porte de Pantin, nul doute que les consommateurs de crack vont devoir se déplacer vers un autre lieu… Jusqu’à ce que de nouvelles plaintes de riverains ne poussent les forces de l'ordre à les expulser à nouveau. D'après les acteurs associatifs, entre 300 et 400 personnes la journée et 150 la nuit, dont 35 à 40 % de femmes, étaient présents dans ce square.

« Au total, près de 1 000 policiers seront mobilisés sur 24 heures, à la fois pour mener à bien l’opération, mais également les jours suivants pour sécuriser les différents secteurs stratégiques et ainsi éviter la reconstitution d’un autre point de fixation », a-t-on toutefois expliqué au ministère de l'Intérieur.

La problématique du crack figure dans la feuille de route confiée par Gérald Darmanin au nouveau préfet de police. Laurent Nuñez dispose d'un an pour l'éradiquer. Le 25 septembre, il avait promis que le site fermerait.

Des réponses sociales qui se font attendre

« Et maintenant ? », questionne la Fédération Addiction. Bien qu'elle considère l'évacuation de la scène ouverte du square Forceval comme un « soulagement », il n'en demeure pas moins que « le problème de la consommation de drogue en pleine rue ne se réglera pas par une simple opération policière, comme les évacuations successives à la Chapelle, à Stalingrad, au jardin d’Éole l’ont prouvé », affirme l'association dans un communiqué dans lequel elle prône des « réponses sociales ».

Associées aux pouvoirs publics dans le cadre du plan Crack de Paris dont les résultats peinent à se concrétiser, les associations proposent depuis plusieurs mois un plan d’actions aux pouvoirs publics, sans réponse. La Fédération Addiction, en lien avec les acteurs de terrain (Gaïa Paris, Groupe SOS, Oppelia Charonne, Proses, Safe), invite à développer l’offre d’hébergements et de logements d’urgence à Paris et en Île-de-France ainsi que les accueils intermédiaires, l’hébergement de plus long terme et des lieux de repos.

Les associations proposent aussi de créer de nouveaux espaces de consommation sécurisée (pour l'instant, seule la salle de consommation à moindre risque de l'hôpital de Lariboisière a vu le jour) et au moins quatre haltes soins addictions supplémentaires à taille humaine dans un délai de trois ans. De manière générale, elles préconisent de porter l'effort sur l’insertion professionnelle, l’aller vers et la prise en charge des comorbidités psychiatriques.


Source : lequotidiendumedecin.fr