En clôture des journées de la prévention et de la santé publique, 500 acteurs de la santé publique ont voté jeudi soir une motion symbolique de soutien à la ministre des affaires sociales Marisol Touraine. Rassemblés dans le grand amphithéatre Binet du centre universitaire des Saint Pères, ils ont publiquement affiché leur opposition au vote par la commission spéciale de l’Assemblée nationale, contre l’avis du gouvernement, d’un amendement à la loi Macron distinguant information et publicité sur l’alcool.
Parmi les personnes présentes, figuraient de nombreux médecins des instances régionales d’éducation et de promotion de la santé (IREPS), mais aussi des représentants de l’Institut de veille sanitaire (InVS) et de l’institut national de prévention et d’éducation thérapeutique (INPES) dont son directeur, le Dr François Bourdillon.
« C’est la cinquième fois que la loi Evin est attaquée de cette manière. Elle se réduit comme peau de chagrin, déclare-t-il au "Quotidien". Lors du vote de la loi hôpital patient santé territoire, le lobby des alcooliers avait réussi à imposer l’autorisation des publicités pour l’alcool sur Internet, ce qui est quand même très fort. »
« Il n’y a plus de prévention primaire en France »
En réponse aux arguments déployés pour défendre l’amendement rédigé par le sénateur Gérard César (Gironde, Les Républicains), pour qui la loi Evin condamne « toute évocation du vin dans un contenu journalistique, culturel, artistique, de divertissement ou encore œnotouristique », le Dr Bourdillon rétorque que « La France ne s’inscrit pas dans une politique prohibitionniste. Le budget publicitaire des alcooliers était de 470 millions d’euros en 2011. En comparaison, l’INPES ne dispose que de 3 millions par an pour diffuser des messages de santé publique. Aujourd’hui, il n’y a quasiment plus de prévention primaire en France », s’insurge-t-il.
La Ligue contre le Cancer a également fait part de son indignation : « Quelle société peut privilégier quelques intérêts d’industriels au détriment du bien public qu’est la santé ? » s’interroge l’association. La Ligue contre le cancer a également affirmé son soutien à Marisol Touraine « face au danger que l’alcool représente pour la population et les générations futures ».
Même son de cloche du côté des acteurs traditionnels de l’addictologie (Association Nationale de prévention en alcoologie et addictologie, Fédération française d’addictologie, société française d’alcoologie, etc.) qui déplorent dans un communiqué commun que cet amendement « ouvrira sans limite un boulevard à l’incitation publicitaire en faveur de la consommation d’alcool. Alors même que se développent les comportements et alcoolisation à risque chez les jeunes, les parlementaires veulent inonder les médias avec la promotion sans limite d’un produit déjà responsable de 49 000 morts par an. »
Citant le baromètre santé 2014, le Dr Bourdillon fait le constat qu’en 10 ans, « la part des 18-25 ans ayant connu une ivresse dans l’année est passée de 33 % à 46 % et la part de ceux en ayant connu au moins trois a presque doublé, de 15 % à 29 %. Je ne peux pas m’empêcher de faire le lien avec les détricotages successifs de la loi Evin », conclut-il.
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