Comme Michael Jackson il y’a quelques années, ou Curt Cobain en son temps, le décès d’artistes mondialement connus dans un contexte d’intoxication médicamenteuse, révèle en réalité de nouvelles habitudes de consommation et de mésusage.
Concernant l’auteur compositeur de « Purple Rain », le Fentanyl semble mis en cause. Ce puissant opioïde de synthèse, utilisé le plus souvent en cancérologie, permet la prise en charge des douleurs chroniques et des accès douloureux paroxystiques. Depuis quelques mois, les États-Unis s’inquiètent de l’utilisation détournée de cette molécule, qui prend progressivement la place de l’héroïne. En France, ce médicament continue à être utilisé majoritairement dans le cadre du traitement de la douleur, mais les autorités sanitaires regardent attentivement la situation outre-atlantique. Pour Francois Beck, directeur de l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), la situation américaine est très particulière : « Le Fentanyl semble être une nouvelle tendance observé dans plusieurs pays européens, mais l'ampleur atteinte aux Etats-Unis et les nouveaux usages de l’héroïne qui en ont découlé sont encore plus surprenants ». En effet, de plus en plus de consommateurs américains sont venus à l’héroïne après des consommations d’antalgiques opiacés, devenant dépendants à ces « pain killers ».
Le CDC tire la sonnette d’alarme aux États-Unis
Dans un rapport écrit conjointement avec la DEA (Drug Enforcement Administration) et publié en octobre 2015, le CDC (Center Disease Control) s’inquiète d’une augmentation des overdoses et des accidents liés au Fentanyl. Celui-ci évoque « 700 décès, liés à du Fentanyl produit illégalement, sous forme non pharmaceutique, souvent mélangé à de l’héroïne ou de la cocaïne », un produit que les consommateurs achètent dans la rue, sous le nom de « China White ». Que le Fentanyl ou d’autres opioïdes de synthèse soient impliqués, le nombre de décès augmente, à tel point que le CDC parle désormais d’une « épidémie d’overdoses aux opioïdes », responsable de 28 000 décès dans le pays en 2014. Le centre s’inquiète d’une augmentation de ces consommations, et appelle à la détection des cas, particulièrement dans les services d’urgence. Celui-ci rappelle l’interêt de la naloxone « antidote sécure et efficace dans tous les cas d’overdoses liés aux opiacés ». François Beck salue cette prise de position sur la naloxone, médicament dont le cadre réglementaire évolue aussi favorablement en France, dans la prise en charge de ces urgences vitales.
En Europe et en France, vigilance sur ces nouvelles pratiques
Pour l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), « on constate à une émergence de ces pratiques en France, mais celles-ci semblent marginales ». Tendance confirmée par l’observatoire européen (OEDT), qui observe, lui, « une augmentation des décès liés aux opiacés pour certains pays du Nord de l’Europe ». Le dispositif TREND (Tendances récentes et nouvelles drogues) de l’OFDT évoque dans son analyse annuelle « une recherche croissante par certaines personnes insérées de médicaments opiacés (hors traitements de substitution) ». Pour François Beck, cette évolution des profils des consommateurs s'inscrit dans la continuité de celle constatée aux États-Unis, même si les objectifs peuvent varier : « Il est encore trop tôt pour déterminer si les personnes socialement insérées, qui achètent dans la rue de l’héroïne ou d’autres opioïdes de synthèse comme le Fentanyl, ont développé une dépendance dans un contexte récréatif, ou secondairement à des prescriptions médicales. » Quel que soit l’opiacé, l’usage et la dépendance semblent augmenter et toucher toutes les catégories de la population. Cependant, l’utilisation ancienne et efficace par la France des traitements de substitution à ces opiacés (méthadone, buprénorphine..), en ville et à l’hôpital, pourrait préserver la population française d’une épidémie à l’américaine.
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