Un entretien avec le Pr SERGE PERROT*.
LE QUOTIDIEN - Pourquoi une étude sur l’acceptabilité des douleurs arthrosiques des membres inférieurs ?
Pr SERGE PERROT - Jusqu’à récemment, on mesurait la sévérité de l’arthrose en fonction de l’intensité des douleurs, et l’efficacité des traitements sur l’amélioration de ces douleurs. Mais l’évaluation de l’intensité de la douleur a des limites, et ce qui compte avant tout c’est la pertinence clinique de ces mesures. En effet, le niveau de douleur ne nous dit pas comment le patient les supporte, quelles en sont les conséquences sur ses activités et sa qualité de vie. L’acceptabilité est donc un nouveau concept dans les maladies chroniques, qui vise à mieux évaluer la maladie, son niveau d’activité, de rémission partielle et l’état de bien-être du patient.
Vous avez cherché à mieux apprécier les répercussions de l’arthrose
?
Effectivement, mais aussi à mieux comprendre les facteurs influençant son acceptabilité et à connaître les seuils de la douleur qui sont acceptables pour le malade, au repos, et lors des mouvements.
Cette étude a été menée en médecine générale ?
Oui, c’est une étude observationnelle nationale chez des patients de plus de 50 ans atteints de gonarthrose ou de coxarthrose douloureuse consultant un médecin généraliste et suivis 7 jours plus tard par un auto-questionnaire. Deux mille quatre cents patients ont été inclus par 1 116 généralistes. La recherche de déterminants de l’acceptabilité a été réalisée séparément dans ces deux localisations. ?
Quels sont les principaux résultats
?
Premier constat : il n’y a pas de différence significative en termes de fréquence d’acceptabilité de la douleur entre la gonarthrose (70,1 %) et la coxarthrose (68,3 %), ni concernant le seuil d’acceptabilité. En revanche, le seuil d’acceptabilité est plus bas au repos (coté à 4) qu’au mouvement (coté à 5) et ce, dans la gonarthrose comme dans la coxarthrose. ?
Quels déterminants de l’acceptabilité avez-vous mis en évidence ?
Dans la gonarthrose, l’acceptabilité est meilleure chez les femmes, chez les sujets âgés de moins de 75 ans, en l’absence d’épanchement articulaire, si la douleur au repos et au mouvement est inférieure à 6/10, dans certaines professions (agriculteurs et cadres) et chez les patients souhaitant une amélioration de leurs activités physiques. ?
Dans la coxarthrose, l’acceptabilité est seulement déterminée par la douleur au mouvement et au repos et par l’indice de masse corporelle (meilleure en l’absence d’obésité). ?
Quelles informations utiles pour la pratique peut-on tirer de ces données ?
D’abord le fait que l’arthrose des membres inférieurs n’est pas une entité homogène « fourre-tout », mais une affection chronique qui a des conséquences différentes selon sa localisation, et un certain nombre de déterminants de son acceptabilité et de son vécu qu’il convient de prendre en compte au niveau collectif, mais aussi individuel. Ensuit, que le niveau de la douleur est important à mesurer, mais qu’il ne reflète pas à lui seul la gêne provoquée par la maladie arthrosique, ni ses répercussions sur la qualité de vie des patients. Enfin, que l’acceptabilité est un élément essentiel à évaluer pour guider la prise en charge des patients. ?
*Médecine interne et thérapeutique, Université Paris-Descartes, INSERM U987, Hôtel-Dieu, Paris.
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