« Pendant des années, on a refusé de faire évoluer la législation sur le chanvre et le cannabis pour des raisons essentiellement dogmatiques et pas forcément scientifiques ou techniques. » Pour Jean-Baptiste Moreau, député LREM de la première circonscription de la Creuse et rapporteur de la nouvelle mission d'information commune relative à la réglementation et l'impact des différents usages du cannabis, la France a un retard à rattraper.
La mission va devoir fournir des éléments en vue de faire évoluer la législation actuelle dont elle constate « l'échec ». La France est en effet « le premier pays européen en termes de consommation de cannabis tout en ayant la réglementation la plus répressive d'Europe », estime Jean-Baptiste Moreau. La mission doit questionner le rapport bénéfice-risque d'une légalisation du cannabis, mais ne se prononcera pas pour autant en faveur ou en défaveur de cette mesure. « Le but n'est pas de dire s'il faut ou non légaliser mais d'apporter des éléments objectifs pour décider de la direction où il faut aller », nuance Jean-Baptiste Moreau.
Tous les aspects seront abordés : réglementaires, sanitaires industriels, économiques, et agricoles. Actuellement, la réglementation française autorise la culture du chanvre mais interdit l'exploitation de sa fleur, ce que dénonce régulièrement le Syndicat professionnel du chanvre (SPC).
Trois axes de travail
Initialement annoncée en juillet 2019 et prévue pour durer 1 an, la mission a pour président le député LR Robin Reda, déjà co-auteur du rapport parlementaire sur la base duquel a été votée la mise en place d'une amende forfaitaire pour usage de cannabis.
Ses membres se répartiront selon trois axes de travail, chacun doté de son rapporteur thématique : Emmanuelle Fontaine-Domeizel (LREM, 2e circonscription des Alpes-de-Haute-Provence) pour le cannabis thérapeutique, Ludovic Mendes (LREM, 2e circonscription de la Moselle) pour le cannabis « bien-être » (c’est-à-dire des produits contenant du CBD, un myorelaxant, et pas de THC, un psychotrope inscrit sur la liste des stupéfiants) et Caroline Janvier (LREM, 2e circonscription du Loiret) pour le cannabis récréatif. Ils se déplaceront dans les pays ayant déjà autorisé le cannabis récréatif et/ou thérapeutique : Israël, Canada, Portugal, etc.
Un travail en parallèle de l'ANSM
Concernant le cannabis « bien-être », la mission traitera « de la valorisation du chanvre, de l'extraction du CBD, du taux de THC dans les produits que l'on va vendre et de la question des catalogues de chanvre que l'on va vendre, énumère Ludovic Mendes. On est sur un produit qui devrait être vendu librement et qui ne l'est pas. »
L'objectif sera de mettre un terme au « flou » dans lequel baigne « depuis trop longtemps » la filière du cannabis CBD, espère Ludovic Mendes qui évoque l'affaire « Kanavape », du nom de cette cigarette au CBD lancée en 2014 et au centre d'un marathon judiciaire depuis.
Le travail de la mission sur le cannabis thérapeutique va se dérouler en parallèle de l'expérimentation de 2 ans du cannabis thérapeutique, menée par l'ANSM et votée dans la dernière loi de financement de la Sécurité sociale. Cette dernière doit porter sur 3 000 patients repartis selon cinq indications : douleurs neuropathiques réfractaires, épilepsies sévères et pharmacorésistantes, soins de support en oncologie, soins palliatifs, spasticités douloureuses de la sclérose en plaques et des autres pathologies du système nerveux central.
« Une de nos tâches sera de tracer la frontière entre le cannabis médicament et le cannabis bien-être », précise au « Quotidien » Emmanuelle Fontaine-Domeizel.
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