La culture de la sécurité en réanimation

Des liens complexes avec la qualité des soins

Publié le 27/11/2014
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Crédit photo : PHANIE

Comment diffuser au mieux la culture de la sécurité des soins au sein des unités d’anesthésie-réanimation en France ? Cette question est au cœur d’une vaste réflexion qui, selon le Pr Paul-Michel Mertes, est aujourd’hui cruciale. « Cette politique de la culture de la sécurité vient en complément de toutes les actions conduites ces dernières années pour permettre l’évaluation et l’amélioration des pratiques », indique le président du Collège français des anesthésistes-réanimateurs (CFAR).

Selon le Pr Mertes, deux éléments doivent être pris en compte. « Il y a d’abord un aspect technique qui concerne, par exemple, la mise en place des programmes d’évaluation des pratiques professionnelles. Mais il y aussi quelque chose qui relève davantage de la culture qui imprègne l’équipe. Et c’est cette culture qui va conditionner la manière avec laquelle l’équipe va recevoir toutes ces actions d’évaluation des pratiques ou réagir face à un événement imprévu. Il s’agit là de deux choses très complémentaires. Dans un établissement où la culture de la sécurité est très implantée, il est évident qu’on trouvera de nombreux programmes d’amélioration des pratiques avec une large adhésion des soignants », souligne le Pr Mertes.

Une culture

Pour bien cadrer le débat, le président du CFAR cite une définition de la culture de sécurité des soins délivrée par la Société européenne pour la qualité des soins. Cette culture « désigne un ensemble cohérent et intégré de comportements individuels et organisationnels, fondés sur des croyances et des valeurs partagées, qui cherche continuellement à réduire les dommages aux patients, lesquels peuvent être liés aux soins ». Dans la foulée, le Pr Mertes insiste sur le fait qu’il n’est pas toujours facile au sein des équipes de faire la différence entre la qualité de la formation et la sécurité des soins. « Le fait d’être un professionnel très bien formé et hautement compétent n’est pas une garantie totale de la sécurité des soins. C’est l’ensemble de la chaîne de soins qui garantit cette sécurité ».

C’est pour avoir un état des lieux le plus précis possible de la situation au sein de la spécialité qu’a été lancé en 2012, sous la coordination du Dr Cédric Bretonnière et du CHU de Nantes, un programme de recherche sur la performance du système de soins (PREPS). Son objectif est de mesurer la culture de sécurité des soins dans les unités de réanimation en France. « Un questionnaire qualité a été adressé à 60 unités pour mesurer un grand nombre d’items, notamment la perception globale de la sécurité, la fréquence de signalements des événements indésirables ou le travail d’équipe entre les services de l’établissement. L’objectif de ce PREPS est de voir s’il existe un lien entre cette culture de la sécurité des soins et les réunions de morbimortalité, qui vise à analyser les incidents et à proposer des solutions », explique le Pr Mertes, en ajoutant que les résultats du PREPS devraient disponibles au début de l’année prochaine.

Sinon, l’analyse de la littérature montre que peu d’équipes se sont attachées à faire le lien entre cette culture de la sécurité des soins et ses conséquences pour les patients. « On trouve quand même quelques papiers qui montrent une diminution de la durée de séjour. D’autres mettent en évidence une diminution de la mortalité mais pas toujours. Enfin, on constate que le lien entre cette culture de la sécurité et la qualité des soins est quelque chose de compliqué, qui ne va pas toujours de soi. Un papier récent montre ainsi que dans certaines unités où les gens ont l’impression de très bien travailler avec un haut niveau de perception de cette culture, il peut se produire une espèce de démobilisation sur ces questions au bout d’un moment ».

D’après un entretien avec Pr Paul-Michel Mertes, CHRU de Strasbourg, président du Collège français des anesthésistes-réanimateurs (CFAR).

Antoine DALAT

Source : Bilan spécialistes