L’INCIDENCE ANNUELLE de la démence de 2 % après 65 ans - soit environ 200 000 personnes nouvellement touchées chaque année - augmenterait à près de 2,7 % après une anesthésie générale. Ces résultats qui ont été présentés dimanche lors du congrès Euroanesthesia sont issus d’un travail prospectif mené par le Pr François Sztark (chef du Pôle Anesthésie Réanimation à Bordeaux) en collaboration avec une équipe Inserm dirigée par Mme Helmer. Le suivi a été réalisé à partir de la cohorte dite cohorte des Trois cités (3C) qui concerne les villes de Bordeaux, Dijon et Montpellier.
Pendant 10 ans, plus de 7 000 personnes âgées d’au moins 65 ans, ont été évaluées sur le plan cognitif, de façon régulière à 2, 4,7 et 10 ans. Chaque évaluation dressait un bilan complet des fonctions cérébrales avec un dépistage systématique de démence.
L’âge moyen des participants était de 75 ans, 62 % sont de sexe féminin. Deux ans après le début de l’essai, 33 % des participants mentionnaient avoir subi une intervention chirurgicale avec anesthésie générale (AG), et 14 % (948) une anesthésie locale ou locorégionale. Au total, 632 personnes (9 %) des participants ont développé une démence au cours du suivi dont 284 maladies d’Alzheimer qualifié de probable, 228 qualifiées de possible et 120 non Alzheimer. L’équipe montre que les patients atteints de démence avaient plus souvent été anesthésiés de façon générale (37 %) par rapport aux patients non déments générant un surrisque significatif au plan statistique de 35 % après ajustement pour tous les facteurs confondants. « L’anesthésie générale ressort comme un facteur de risque de démence quel que soit le type, Alzheimer ou non, de façon tout à fait indépendante, assure le Pr Sztark. Le risque relatif est de 1,35 et nous avons tenu compte de tous les facteurs de confusion possible, le profil vasculaire, l’existence d’un diabète ». En revanche, les locorégionales sont sons effet. Le surrisque additionnel de plusieurs AG - non évalué par le design méthodologique de l’essai, n’a pas été mis en évidence.
Les mécanismes.
Les mécanismes physiopathologiques qui soutendent ce surrisque sont multifactoriels et tiennent autant à la chirurgie qu’à l’anesthésie elle-même. « Après chirurgie, les modèles animaux montrent des anomalies biochimiques telles la phosphorylation de la protéine Tau et des perturbations cliniques à type de dysfonctions cérébrales » rappelle le spécialiste.« Chez l’animal, les anesthésiques généraux comme les hypnotiques, les gaz halogénés et le propofol, provoquent des démences. Ces produits entraînent des lésions proches de celles de la maladie d’Alzheimer. La chirurgie, quant à elle, génère des désordres hémodynamiques, une hypothermie et une réponse inflammatoire générale qui peuvent aussi favoriser les lésions ».
La prévention.
« Il y a certainement un risque augmenté dans cette population âgée soumise à une AG, qu’il faut connaître, insiste le Pr François Sztark. Les patients qui présentent déjà une dysfonction cognitive doivent être suivis de près, en postopératoire. Il faut éventuellement penser à mettre en place des filières de soins pour les patients les plus à risques ». Les anesthésies locorégionales quand elles sont possibles, doivent être privilégiées.
D’après un entretien avec le Pr François Sztark (Bordeaux)
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