ON A TENDANCE à ne pas vouloir la voir. Pourtant, la détresse des proches lors d’une maladie fatale existe bel et bien. Parfois aussi difficile à vivre que pour le malade lui-même. C’est ce que souligne une équipe de soins palliatifs d’Édimbourg, qui a analysé les témoignages de 19 patients ayant un cancer du poumon et de 19 membres de la famille proche. Au total, 88 entretiens ont été recueillis, 42 chez les patients et 46 chez les aidants. L’équipe du Dr Scott Murray a pu constater que les proches éprouvaient un mal-être social, psychologique et spirituel de façon assez stéréotypée selon l’étape de la maladie. L’état d’âme de l’entourage semble ainsi refléter le parcours du sujet malade. En effet, les médecins écossais ont pu observer que les remises en question spirituelles et psychologiques étaient partagées au sein du foyer et qu’elles évoluaient de façon dynamique au fil des discussions familiales.
Outre la question torturante et sans réponse du « Pourquoi nous ? », le fait d’assister à la souffrance d’un être aimé relance les réflexions personnelles sur le sens de la vie. Certains aidants peuvent même souffrir physiquement et mettre en question leur capacité à s’occuper de la personne malade. D’après l’étude écossaise, certaines périodes charnières fragilisent beaucoup le patient et son entourage : l’annonce du diagnostic, le retour à domicile après traitement initial, les rechutes et la phase terminale. Ce n’est donc pas seulement lors de cette dernière et de la période de deuil que la famille a besoin de soutien, mais tout au long du parcours. Même si le vécu est multidimensionnel et hautement variable selon l’histoire de chacun, les médecins écossais ont remarqué qu’il existait des « trajectoires types » au fur et à mesure de l’évolution de la maladie. Plusieurs secteurs sont ébranlés chez les membres de la famille suite à l’annonce du cancer du poumon : santé physique, vie sociale, bien-être intérieur, vie spirituelle.
Des cheminements-type
L’entourage peut rencontrer des problèmes de santé physique, tels que mal de dos et fatigue extrême. Sur le plan social, les proches ont de plus en plus de mal à laisser leur malade tout seul, renonçant alors à leurs activités sociales habituelles, qu’elles soient de loisir ou de travail. Leur rôle d’aidant va parfois absorber tout leur temps libre et leurs congès. Ce d’autant que les autres membres de la famille peuvent être réticents à rendre visite et à prendre le relais, laissant alors toute la charge à quelques proches qui se sentent de plus en plus isolés. Leur vie se centre alors uniquement sur la maladie. On comprend alors aisément que l’équilibre psychologique est perturbé. Læs membres de la famille ont l’impression de vivre des émotions en montagnes russes. Ils passent ainsi par une forte anxiété lors du diagnostic, à une pression écrasante lors du retour à domicile, lors des rechutes à une grande difficulté à exprimer de l’empathie. Le tout en gérant leur propre tristesse, en « encaissant » certains comportements agressifs du malade et en affrontrant le décès en phase terminale. De même, sur le plan spirituel, la proximité d’avec la mort bouleverse et questionne sur les grandes orientations de la vie. Des couples ont pu avoir envie de se marier lors du diagnostic. Certains aidants cherchent un soutien dans la prière lors des rechutes. Beaucoup ont l’impression que le monde s’écroule lors du décès.
Avoir besoin d’aide.
Les auteurs suggèrent qu’une prise en charge de l’entourage devrait être proposée à certains moments critiques afin de prévenir de trop grandes souffrances. Cette aide permet, par ailleurs, à la famille d’être un peu rassurée sur le fait qu’il est tout à fait normal de se sentir stressé, d’avoir l’impression de ne pas être à la hauteur de la situation et d’avoir besoin d’aide. En apaisant la détresse de la famille, les auteurs espèrent ainsi mettre en avant les aspects positifs de l’accompagnement palliatif, à savoir l’apprentissage de la résilience et la valorisation d’apporter de l’aide.
BMJ, 2010;304:c2581
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