C’est une étape attendue et essentielle au déploiement d’un dépistage organisé des cancers du poumon qui a été franchie. L’Institut national du cancer (Inca) a annoncé le 23 janvier le lancement d’un programme pilote qui devrait inclure de premiers patients dès l’été. Au total, ce projet prévu pour durer au moins trois ans dépistera 20 000 fumeurs ou anciens fumeurs (depuis moins de 15 ans), âgés de 50 à 74 ans, avec une consommation tabagique cumulée d’au moins 20 paquets-années.
En France, avec plus de 30 000 décès chaque année, les cancers du poumon comptent parmi les « plus meurtriers », a rappelé le Pr Norbert Ifrah, président de l’Inca, lors d’une conférence de presse. La survie à 5 ans ne dépasse actuellement pas 20 %, car près des trois quarts des cas sont diagnostiqués à un stade avancé. La « détection précoce » des cas « offre des chances réelles de guérison », donnant au dépistage un « intérêt majeur pour la santé publique », insiste-t-il.
Ce projet pilote, qui préfigure un dépistage à grande échelle, est l’aboutissement d’un long cheminement. Plusieurs études ont déjà démontré les bénéfices d'un dépistage du cancer du poumon par scanner faible dose. La détection précoce des tumeurs permet de réduire la mortalité de 20 à 25 %. Mais ce n’est qu’en 2022, après la publication des résultats de l’étude européenne Nelson, que la Haute Autorité de santé a donné son aval à la mise en place d’expérimentations d’un dépistage organisé à l’image de ce qui est pratiqué pour les cancers du sein, du col de l’utérus et colorectal.
Un consortium et 29 structures partenaires
Pour identifier les acteurs capables de mener une telle expérimentation, l’Inca a émis en juillet 2024 un appel à candidatures. Et c’est un consortium, baptisé « Impulsion », qui a été sélectionné par un jury international. Il est coordonné conjointement par la Pr Marie-Pierre Revel à l’AP-HP et le Pr Sébastien Couraud aux Hospices civils de Lyon (HCL) et associe 29 structures partenaires. Il percevra un financement de 6 millions d’euros, un budget « à la hauteur de l’enjeu », juge le Pr Ifrah.
Dans les autres dépistages organisés, le seul critère de participation étant celui de l’âge, la population cible est aisément identifiable. Dans le cas du cancer du poumon, l’ajout du critère de tabagisme actuel ou ancien ajoute une complexité. Le repérage sera facilité par la mobilisation des généralistes, des infirmiers en pratique avancée (IPA), des pharmaciens, des sages-femmes, des pneumologues, des addictologues ou encore des radiologues.
Concrètement, un scanner thoracique faible dose, couplé à un parcours de sevrage tabagique, sera proposé à la population cible. L’examen est à effectuer deux fois à un an d'intervalle, puis tous les deux ans. L'Assurance-maladie prendra en charge à 100 % les scanners. Plusieurs modalités d’invitation au dépistage seront testées, avec une attention particulière aux populations les plus éloignées des soins. L’ambition est de définir les modalités les plus pertinentes en vue d’une généralisation.
Les ARS en appui pour l’organisation locale
L’organisation sera mise en place en lien avec les agences régionales de santé (ARS), en commençant certainement dans les régions des promoteurs : Île-de-France et Auvergne Rhône-Alpes. Là où un dispositif est en place, « on ne désorganise pas », assure le Pr Ifrah. Les résultats obtenus par des programmes déjà installés, comme celui de l’hôpital Foch, seront pris en compte. « Le travail de généralisation va s’enrichir de l’ensemble des projets », explique le président de l’Inca.
Au-delà des modalités d’invitation au dépistage, le programme pilote doit permettre de définir les conditions optimales de mise en œuvre : durée, fréquence, nombre de clichés à réaliser, place de l’IA dans la lecture des images, recours à une faible dose ou à une très faible dose, répercussion sur l’offre de soins, etc. Pour anticiper l’afflux de patients, la Société française de radiologie forme depuis 2 ans des spécialistes à la réalisation du scanner et à sa lecture.
Les résultats de l'étude pilote serviront de base à la mise en place d’un dépistage organisé. « On peut espérer une généralisation avant même l'horizon 2030 », échéance initialement avancée pour le déploiement national, a indiqué le Pr Ifrah.
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