La nouvelle classification AJCC des mélanomes

Des améliorations mais pas de révolution

Publié le 10/03/2010
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Crédit photo : PHANIE

LA PRÉCÉDENTE révision de la classification histopronostique du mélanome, qui datait de 2001, s’était fondée sur l’analyse des données portant sur plus de 17 000 patients du registre de l’American Joint Committee of Cancer (AJJC). Elle avait alors marqué un véritable changement dans la démarche pronostique et thérapeutique.

« Les modifications apportées à la septième édition de la classification AJCC, officialisée début 2010, sont moins radicales, mais elles permettent d’affiner le pronostic », expose le Pr Philippe Saiag. Tout d’abord parce qu’elles se basent sur les données actualisées portant sur un plus grand nombre de patients : 30 946 avec un mélanome de stade I à III et près de 8 000 ayant un mélanome de stade IV.

L’index mitotique.

L’une des principales évolutions est la prise en compte de l’index mitotique (défini par le nombre de mitoses / mm2 autour du hotspot) qui, à côté de l’épaisseur de la tumeur et de la présence d’ulcérations, est reconnu comme l’un des principaux facteurs pronostiques des tumeurs localisées. « L’anatomopathologiste doit aujourd’hui absolument donner cet index », insiste le Pr Saiag

D’autre part, l’index mitotique supplante désormais l’indice de Clark dans la définition des mélanomes T1b. Sont maintenant classées en T1a les tumeurs d’au plus 1 mm d’épaisseur, sans ulcération et dont l’index mitotique est inférieur à 1/mm2. Les mélanomes T1b, qui représentent 40 % des T1, sont définis comme ayant une épaisseur inférieure ou égale à 1 mm, et au moins une mitose / mm carré ou une ulcération. « C’est donc désormais le taux de mitose qui guide l’entrée vers le ganglion sentinelle », poursuit le Pr Saiag

Micrométastases sur ganglion sentinelle.

L’évaluation du statut ganglionnaire évolue, avec un diagnostic de micrométastases fait sur la procédure du ganglion sentinelle. Chez les patients porteurs de métastases intralymphatiques, les taux de survie à 5 et 10 ans sont respectivement de 69 % et 52 % en l’absence de métastases ganglionnaire (N2c), et respectivement de 46 % et 33 % en présence de ganglions métastatiques (N3).

« Globalement, selon cette analyse qui porte, rappelons-le, sur un très grand nombre de patients, le pronostic s’est amélioré, puisque tous les mélanomes avec un ganglion sentinelle positif basculent dans le stade ganglionnaire. Les tumeurs N0 sont donc moins « polluées » par les tumeurs N+ », explique Philippe Saiag.

Dans les mélanomes de stades I et II, la survie à 5 ans est de 97 % pour les tumeurs T1aN0M0 et de 53 % pour les tumeurs T4bN0M0.

« De même, le pronostic n’est pas si mauvais dans les N1A et N2a comparativement aux N2b et N3, qui ont un envahissement ganglionnaire macroscopique ».

Quelles sont les conséquences pratiques de cette nouvelle classification ? « Elles vont conduire à faire de plus en plus de ganglion sentinelle, alors qu’il n’est pas établi que cela améliore le pronostic. La technique reste discutée dans les T2, T3 et T4, sans envahissement ganglionnaire clinique. Les recommandations permettent en revanche de mieux classer les tumeurs et de ce fait de mieux adapter la stratégie thérapeutique. On sait notamment que les N1a et N2a répondent mieux à l’interféron alpha adjuvant ».

Autre évolution : le diagnostic histologique des métastases intralymphatiques isolées, associées à une meilleure survie que les autres stades IIIb. « C’est un plus et l’on doit s’y référer », note le Pr Saiag.

En revanche, il y a peu de modification dans les stades métastatiques. Les deux paramètres pris en compte pour définir la catégorie M sont toujours le site des métastases et le taux sérique de lactate déshydrogénase.

D’après un entretien avec le Pr Philippe Saiag, hôpital Ambroise-Paré, Boulogne-Billancourt.

(1) Journal of Clinical oncology, Dec 20 2009; 27: 6199-6206.

 Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Bilan spécialistes