Mélanome

Des avancées sans précédent en adjuvant

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Publié le 15/01/2018
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Crédit photo : Phanie

Jusqu'à présent, la possibilité d’utiliser les thérapies ciblées et l’immunothérapie dans un contexte adjuvant restait à confirmer. Or, lors du congrès de l’European Society of Medical Oncology (ESMO) fin 2017, deux résultats essentiels ont été présentés.

Des thérapies ciblées efficaces en association

Les thérapies ciblées associant un anti-BRAF (dabrafenib) et anti-MEK (trametinib) ont été évaluées, versus placebo, chez 870 patients de stade III (avec curage ganglionnaire) traités pendant un an (1,2). Avec près de trois ans de suivi, cet essai montre un net bénéfice en faveur du bras combiné. Par rapport au placebo, l’association réduit de 53 % le risque de récidive ou de décès (HR = 0,47). Un bénéfice en termes de survie globale (SG) est également retrouvé (HR = 0,57). « Avec la thérapie ciblée (dont l’arrêt au stade métastatique entraîne des récidives), nous pouvions craindre que les patients rechutent après un an de traitement. Or, l’effet se maintient. Après trois ans de suivi, nous avons encore un bénéfice important. L’ampleur de l’efficacité du traitement est surprenante. Cette association mérite largement d’avoir une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication ».

Préférer le nivolumab comme immunothérapie

Depuis plus d’un an, l’efficacité de l’ipilimumab a été démontrée au stade adjuvant, chez des patients avec un mélanome de stade III, opérés au niveau ganglionnaire. Actuellement homologué aux États-Unis, l’ipilimumab à forte dose avait cependant été à l’origine d’effets secondaires et de décès. « Les décès sont difficiles à accepter au stade adjuvant », précise le Pr Caroline Robert. Cette année à l’ESMO, l’essai CheckMate 238 (3,4) a mis en évidence, chez 906 patients de stade III/IV, une amélioration significative de la survie sans récidives (SSR) à 18 mois de suivi (66,4 % sous nivolumab versus 52,7 % sous ipilimumab, HR = 0,65, p <0,0001). « Il montre un avantage évident du nivolumab versus ipilimumab. Même s’il ne s’agit pas de SG mais de SSR, les résultats révèlent beaucoup moins de toxicité et beaucoup plus d’efficacité sous nivolumab ».

En cas de ganglion sentinelle : curage ganglionnaire ou pas ?

D’autre part, une étude a évalué l’impact du curage ganglionnaire après découverte d’un ganglion sentinelle. « Jusqu’à présent, en cas de ganglion sentinelle positif, nous enlevions les autres ganglions de la chaîne ganglionnaire car nous suspections qu’ils contiennent également des métastases (retrouvées que dans 20 % des cas) ». Or, un essai américain d’envergure a comparé, chez les patients ayant un ganglion positif, deux stratégies différentes : réalisation d’un curage versus absence de curage remplacé par un suivi échographique. Aucune différence de survie n’a été retrouvée entre les deux bras de l’étude. « Les patients sans curage ganglionnaire vivent aussi longtemps que les autres, avec certes un peu plus de récidives locales (opérées dans un second temps), sans présenter davantage de métastases disséminées ou mortelles. Ceci remet complètement en question nos pratiques », reconnaît Caroline Robert.

En effet, dans tous les essais adjuvants réalisés, un curage était requis. Les résultats de ces essais sont-ils également applicables chez des patients n’ayant pas eu de curage ? Afin de lever cette interrogation, « nous avons aujourd’hui des essais adjuvants, notamment une étude comparant le nivolumab à l’association nivolumab/ipilimumab, qui ne requièrent pas obligatoirement de curage », répond Caroline Robert.

De nouvelles voies d’avenir

À l’avenir, les résultats des essais de combinaisons associant un anti-PD1 (nivolumab ou pembrolizumab) à différentes molécules (immunothérapie ou thérapies ciblées) sont escomptés. « L’objectif est d’augmenter l’efficacité en limitant la toxicité. Nous avons des résultats préliminaires encourageants mais les phases III sont en cours. Pour le mois d’avril, nous attendons les résultats de l’essai pembrolizumab versus placebo en adjuvant ».

Concernant la sélection des patients, beaucoup de pistes restent encore à explorer. « De nombreuses données tournent autour de l’influence potentielle du microbiote. Celles-ci sont complètement inutilisables aujourd’hui car elles restent très préliminaires et fondamentales. Il en est de même pour la recherche sur les taux de mutations ».

D’après un entretien avec le Pr Caroline Robert, Institut Gustave Roussy de Villejuif.
(1) Hauschild Axel. Présentation orale ESMO 2017 (Abstract LBA6_PR)
(2) Long GV et al. N.Engl J Med. DOI :10.1056/NEJMoa1708539
(3) Weber J. Présentation orale ESMO 2017 (Abstract LBA8_PR)
(4) Weber J et al. N Engl J Med. DOI: 10.1056/NEJMoa1709030

Karelle Goutorbe

Source : Bilan Spécialiste