L'identification de l’ADN tumoral repose sur la détection de mutations génétiques et/ou épigénétiques, de mutations spécifiques type EGFR, de réarrangements chromosomiques ou d'aberrations dans le nombre de copies. Mais cet ADN tumoral est en très petite quantité par rapport à l’ADN normal. La sensibilité de détection, longtemps limitante, est désormais de l'ordre de 0,1-0,5 % d'ADN tumoral /ADN normal avec une bonne reproductibilité grâce à l'amplification par PCR compartimentée dans des gouttelettes (technique digitale) et au séquençage haut débit. « Si les applications cliniques sont encore restreintes, c'est plus en raison de l'absence de validation clinique suffisante », selon le Pr Pierre-Laurent Puig (HEGP, Paris).
Peu de place en dépistage et diagnostic
« La quantité d'ADN tumoral plasmatique dépend de la masse tumorale. C'est pourquoi les biopsies liquides ont peu de place dans le dépistage ». Dans le cancer colorectal, une étude a d'ailleurs montré que la biopsie liquide n'était pas plus sensible que le dépistage par Hémocult (1).
« Les biopsies liquides ne peuvent pas non plus se substituer aux biopsies tissulaires pour poser le diagnostic ». De nombreuses tumeurs bénignes sont déjà porteuses de mutations. C'est notamment le cas des pathologies pancréatiques prénéoplasiques. La biopsie liquide peut néanmoins apporter des arguments diagnostiques.
Facteur pronostique et adaptation thérapeutique
« L'optimisation du traitement est un champ prometteur pour les biopsies liquides. La quantification de l'ADN tumoral initial et son évolution sous traitement ont en effet une valeur pronostique intéressante. Et la recherche de mutations spécifiques, en rapport avec la sensibilité à telle thérapeutique ciblée, permet d'adapter le traitement et dépister l'émergence de résistances ».
« Lors du diagnostic, le taux d'ADN tumoral circulant est un marqueur pronostique dans les cancers colorectaux quel que soit le stade. La persistance d'ADN tumoral 15 jours après l'opération d'un cancer colorectal résécable est un facteur de récidive précoce (2). Enfin durant une chimiothérapie, la vitesse de décroissance du taux d'ADN tumoral, est un reflet de la sensibilité de la tumeur au traitement. Une étude est d'ailleurs en cours dans les cancers du sein triple négatifs ».
« Mais c'est la recherche de mutations spécifiques, conditionnant la sensibilité à une thérapie, qui est la plus avancée en termes de validation clinique. D'ailleurs la seule indication aujourd'hui validée des biopsies liquides est la recherche de mutation EGFR dans le cancer du poumon quand le site n'est pas accessible pour une biopsie tissulaire ». Toutefois d'autres mutations, notamment les mutations de KRAS dans le cancer colorectal et de KIT dans les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) sont en cours de validation en clinique. « Et le suivi de ces mutations de sensibilité pourrait permettre d'adapter le traitement lors de progression tumorale. D'autant que les biopsies liquides présentent l'avantage d'être un reflet de ce qui se passe dans l'ensemble des sites tumoraux - quand certaines métastases répondent et d'autres pas - contrairement à une simple biopsie tissulaire ».
D'après un entretien avec le Pr Pierre Laurent Puig (HEGP, Paris)
(1) Church TR et al. Gut 2014;63:315-25
(2) Tie et al. Sci Transl Med 2016;8:346ra92
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