Le Professeur Fabrice Barlesi, directeur médical et de la recherche clinique de Gustave Roussy, a rapporté l’expérience du centre pendant l'épidémie de SRAS-CoV-2. Entre le 14 mars et le 15 avril, 7 251 patients atteints de cancer ont été pris en charge à Gustave, parmi lesquels 1 302 ont été testés, dont 12 % se sont révélés positifs pour le SRAS-CoV-2. Le critère d’évaluation principal de la sévérité de l’infection reposait sur la nécessité d'une supplémentation en oxygène d’au moins 6 l/min ou le décès de toute cause. L’aggravation clinique est survenue dans 25 % des cas.
Les facteurs prédictifs significatifs de mauvais pronostic étaient :
- Un mauvais état général (ECOG > 1), retrouvé chez 40 % des patients et qui multiplie le risque par 4
- Une hémopathie maligne, chez 16 % des patients, multiplie le risque par 2,5
- Une chimiothérapie cytotoxique pour une maladie métastatique dans les 3 mois précédents, multiplie par 2 le risque « sauf dans les tumeurs localisées, avec des traitements adjuvants ou néoadjuvants, qui peuvent donc être poursuivis » explique le Pr Barlesi.
Le sexe, l’âge, l’indice de masse corporelle, le statut tabagique, un traitement par immunothérapie ou thérapie ciblée ne semblent pas avoir d’impact.
La majorité des patients ont été traités par hydroxychloroquine/azithromycine (40 patients), lopinavir/retronavir (5), anti-IL-6 (10) ou corticoïdes (13). Ils ont été inclus dans 4 essais cliniques, Oncovid dont Gustave Roussy est le promoteur, dans Corimuno, Icare, ImmunOncovid et dans diverses autres études. « Globalement, nos patients atteints de cancer ne semblent pas plus touchés que la population générale par le SRAS-CoV-2, et l’infection ne semble pas être plus agressive (15 % de décès chez personnes hospitalisées) », conclut l’oncologue.
Un surrisque dans les formes métastatiques
Deux études menées à Wuhan avaient par contre révélé un risque plus élevé de formes graves du Covid-19. Dans l’une, chez 28 personnes traitées par inhibiteurs de check-point (25 % pour cancer du poumon), plus de la moitié a fait des complications graves et 29 % sont décédées. « La prise d’un traitement anticancéreux dans les 15 jours précédant l’infection multiplie par 4 le risque de formes graves du Covid, mais ces données limitées ne semblent pas montrer un surrisque avec les inhibiteurs de check-point », conclut Li Zhang. Dans une autre étude menée chez des sujets Covid-19 positifs, dont 105 patients atteints de cancer et 536 personnes contrôle appariées sur l’âge, le risque de formes sévères est plus élevé en particulier en cas d’hémopathie maligne (33 % de décès), de cancer du poumon (18 %) ou de l’œsophage (17 %). Les complications graves du Covid-19 sont dues aux tumeurs métastatiques (risque de décès multiplié par 5,5), les formes non métastatiques ne semblant pas plus à risque de formes graves que les patients non atteints de cancer. Un geste chirurgical dans les semaines précédentes majore ce risque, contrairement à la radiothérapie.
Les données espagnoles et italiennes confirment que les tumeurs primitives ou les métastases pulmonaires sont des facteurs de mauvais pronostic.
Les chiffres du Memorial Sloan Kettering Cancer de New York (non validés à la date de la présentation) révèlent que parmi les 4 800 patients atteints de cancer, 18 % étaient Covid positifs, parmi lesquels 42 % ont été hospitalisés et 14 % sont décédés.
(1) congrès de l'American Association for Cancer Research (AACR), 27-28 avril 2020
(2) https://www.abstractsonline.com/pp8/#!/9045/session/862
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