Enfumage et polémiques dans les fumées des PM2,5

Publié le 07/04/2014
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Et si le diesel était un faux coupable ? Selon un réseau d’industriels et constructeurs automobiles (CITEPA), les transports routiers ne seraient responsables en fait que de 19 % des émissions de particules, loin derrière par exemple le chauffage des bâtiments – à cause du fioul et du bois – avec 39 %.

On peut en déduire, toujours selon CITEPA, que « le diesel ne serait impliqué que pour environ 8 000 morts », soit 5 fois moins que ce que donne à penser la presse, avec le chiffre des 42 000 victimes. Et encore ce chiffre de 2005 serait aujourd’hui un tiers plus bas, soit 5 000 morts, et le diesel ne représenterait que 20 %, soit 1 000 morts par an.

L’agriculture en pole-position

De fait, lors du récent pic de pollution aux particules fines, l’observatoire atmosphérique Sirta situé à 20 km au sud-ouest de Paris, seule station française de surveillance de l’atmosphère capable de rendre compte des niveaux et de la nature des pollutions, a observé que les particules fines étaient principalement issues de l’agriculture, puis du chauffage au bois, les transports ne venant qu’en troisième rang. Le rapport publié conjointement par les académies des sciences et de médecine, avec le CIRC (centre international de recherche sur le cancer) abondait dans cette minoration en 2007, année du premier Grenelle de l’environnement : « Contrairement à une opinion largement répandue, la pollution n’a qu’un rôle très limité : environ 0,1 % des cancers si l’on s’en tient uniquement aux cancérogènes avérés. Si l’on y ajoute la pollution atmosphérique, notamment les particules fines des gaz d’échappement des moteurs diesel, en admettant que 50 % des Français y sont exposés et qu’elles induisent 7 % des cancers du poumon, on trouve qu’environ 1 % de la totalité des cancers sont dus à la pollution. Ce n’est pas une cause majeure », conclut le rapport (1).

Une condamnation à nuancer ?

S’interrogeant à l’Académie de médecine sur l’impact des particules diesel entre mythe et réalité, le Pr Michel Aubier, chef du service de pneumologie de l’hôpital Bichat, tout en soulignant que « la pollution liée au transport reste bien un vrai problème sanitaire », suggère de nuancer la condamnation du diesel. D’autant, souligne-t-il, qu’« en 20 ans, les nouvelles technologies automobiles auraient permis de réduire de 39 % les émissions de particules en particulier grâce aux progrès de la motorisation diesel (optimisation de la combustion, suralimentation, injection directe, filtre à particules). »

Il faudrait donc cesser de focaliser sur les émissions des moteurs diesel. Selon la formule du Pr Tubiana, le diesel serait « victime des angoisses devant la modernité, angoisses propagées par les écologistes, relayés par les médias et exploitées par des concurrents financiers ».

« L’avantage supposé des filtres à particules est un mensonge, rétorque la députée européenne Michèle Rivasi, car ils ne sont efficaces qu’à partir d’une certaine température. » Et rappelant que 80 % du carburant vendu en France est du diesel, la vice-présidente des Verts à Strasbourg de militer « pour la réduction de la vitesse, la circulation alternée, les péages urbains, la promotion des transports doux et le développement des transports publics ».

Considérant que les dangers que font peser les particules fines sur la santé de nos concitoyens n’est plus une hypothèse mais une vérité scientifique, le Dr Jean-Marie Le Guen, adjoint au maire de Paris en charge de la santé, proposait « d’avancer vers l’interdiction de circuler aux véhicules diesel dans la capitale ». Une proposition qu’il maintient deux ans après.

(1) Cité par le Pr Maurice Tubiana, « Arrêtons d’avoir peur ! », Michel Lafon, 2012.

Ch. D.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9316