ET SI DEPUIS des décennies les chirurgiens gynécologiques faisaient fausse route dans les interventions sur le cancer du col ? Michael Höckel et son équipe de Leipzig (Allemagne) se sont posé la question. L’hystérectomie totale actuelle, expliquent-ils, se fonde peu ou prou sur les principes de Wertheim posés voici plus d’un siècle. Elle répond aux règles de l’anatomie chirurgicale, elle gagnerait, au plan carcinologique, à suivre les origines embryologiques des tissus, postulent-ils. C’est pourquoi l’équipe a réalisé un essai prospectif, en opérant par Résection MésoMétriale Totale (RMMT) des femmes atteintes d’un cancer cervical à des stades plutôt débutants : IB, IIA et, pour certaines, IIB (classification FIGO). Le suivi moyen de 41 mois a confirmé la validité de l’hypothèse de départ, d’autant qu’aucune patiente n’a subi d’irradiation complémentaire.
Avant d’aller plus loin dans la description de ce travail, il convient de préciser la différence fondamentale entre les deux techniques chirurgicales.
L’hystérectomie totale classique répond à deux principes : l’anatomie chirurgicale est dérivée d’une méthodologie empirique allant du haut vers le bas ; le modèle de dissémination locale de la tumeur admet une propagation transcervicale linéaire et aléatoire.
Base du curage ganglionnaire.
La RMMT réalise une ablation complète du compartiment utéro-vaginal d’origine müllérienne, sauf pour sa partie distale, où la résection intracompartimentale préserve une partie du vagin. Ces organes d’origine müllérienne sont les trompes, l’utérus, les parties proximales et moyennes du vagin, enveloppés par un tissu péritonéal, le mésomètre (les tissus paravaginaux et du paramètre sont d’une autre origine). Ces distinctions servent de base au curage ganglionnaire, ainsi qu’à la conservation des éléments non intracompartimentaux de proximité (vaisseaux vésicaux, innervation autonome…) dès lors que les limites saines du compartiment ont pu être exposées.
C’est ainsi que 212 patientes consécutives ont été enrôlées. Elles ont subi une RMMT, non suivie d’irradiation, parfois précédée de chimiothérapie néoadjuvante. Parmi elles, 134 (63 %) étaient à risque histopathologique élevé. À mi-parcours du suivi, soit au 41e mois en moyenne, 3 participantes avaient déclaré des récidives pelviennes, 2 localement et à distance, 5 uniquement à distance. Ces résultats permettent d’évaluer à 94 % la probabilité d’absence de récidive et à 96 % le taux de survie à cinq ans. Chez 20 patientes (9 %) un événement morbide est survenu, le plus souvent d’origine vasculaire.
Cartographie par IRM des récidives.
À titre de comparaison, l’équipe allemande a réalisé une cartographie par IRM des récidives chez des patientes qui avaient subi une hystérectomie conventionnelle. Les zones les plus touchées concernaient le mésomètre à proximité du mésorectum. Cette direction prise par les cellules cancéreuses n’est pas en accord avec les concepts de l’anatomie chirurgicale, mais correspond bien à l’hypothèse müllérienne. De même l’atteinte des ganglions pré-sacrés, pré-sciatiques et glutéaux conforte les Allemands, puisque, non curés classiquement, ils font partie du curage en RMMT.
Le principe de la résection mésométriale est compatible, écrivent les auteurs, avec une large excision intracompartimentale afin de préserver la fertilité en cas de petite tumeur. Elle peut également devenir supra- ou multicompartimentale face à une tumeur localement avancée. La RMMT, enfin, peut être réalisée par voie laparoscopique ou assistée par robot. « La technique sans adjonction d’une irradiation peut améliorer le pronostic du cancer cervical, conclut l’équipe. Une évaluation ultérieure par essais multi-institutionnels contrôlés est nécessaire. »
Lancet, 1er juin, doi :10.1016/S1470-2045(09)70100-7.
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