Le mode de financement des tests oncogénétiques est un motif de grande inquiétude en cancérologie. La prise en charge actuelle, qui repose sur le référentiel des actes innovants hors nomenclature (RIHN), arrive à échéance, sans que les modalités pour un remboursement par l’Assurance-maladie ne soient rendues possibles. Les difficultés d’accès vont se multiplier, creusant les inégalités de santé.
La Société française de médecine prédictive et personnalisée (SFMPP) s’en est alarmée lors de son congrès annuel fin septembre. « Presque tous les cancers (poumon, sein, côlon, ovaire, pancréas, prostate…) font aujourd’hui l’objet d’une analyse génétique indispensable pour orienter les thérapeutiques », avait rappelé le Pr Pascal Pujol, président de la SFMPP.
« Il y a un enjeu stratégique autour de la médecine de précision dans toutes ses dimensions, et notamment le diagnostic moléculaire », avait souligné quant à lui le Pr Jean-Yves Blay, président d’Unicancer lors de la convention nationale des centres de lutte contre le cancer mi-novembre. « La caractérisation moléculaire est maintenant un standard : l’oncologie de précision, c’est la cancérologie de 2021 », avait-il insisté lors du congrès de la SFMPP.
Creusement des inégalités de santé
Créé en 2015, le RIHN donne un statut temporaire aux nouvelles procédures, qui sont remboursées pendant trois ans, avec une possible prolongation de deux ans. Le dispositif touche à sa fin. Pour que les tests puissent être transférés dans la nomenclature des actes de biologie médicale et basculer vers un remboursement par l’Assurance-maladie, ils doivent être évalués par la Haute Autorité de santé (HAS) sur la base des données cliniques et médico-économiques. « La HAS n’a pas ouvert cette année son dispositif d’évaluation et d’appréciation des nouveaux actes en génétique », avait déploré le Pr Pujol. Aucune issue à attendre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2022, qui « ne contient pas un mot sur l’innovation diagnostique ni sur le RIHN », a-t-il ajouté.
Les cancérologues craignent un accroissement des inégalités, l’accès étant déjà difficile pour certains centres. « En 2018, la DGOS a fixé un montant de remboursement à la moitié du prix effectif des tests génétiques, a rappelé le Pr Jean-Jacques Zambrowski, médecin et professeur de politique et d’économie de la santé (univeristé Paris-Saclay). Les grands centres de cancérologie peuvent financer le reste à charge aux patients, alors que d’autres n’ont pas cette possibilité financière. »
BRCA1/2 : des recos européennes
Le problème se pose notamment pour le testing des gènes BRCA1/2, dont les indications préventives et thérapeutiques se sont étendues. Pour la première fois, des recommandations européennes menées à l’initiative de la France ont vu le jour pour la recherche de mutation, qu’elle soit germinale ou tumorale. Le point fort des recommandations est de proposer dans certaines situations le testing BRCA indépendamment de l’histoire familiale.
L’arrivée des inhibiteurs de PARP a en effet changé la donne, à un stade précoce ou avancé, dans plusieurs cancers (ovaire, sein, prostate, pancréas). « Aujourd’hui, ne pas prescrire le test dans certaines situations familiales ou thérapeutiques constitue une perte de chance potentielle », avait souligné le Pr Pujol, qui a participé au travail.
Quelque 30 000 nouvelles indications sont prévisibles par an en France.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024