L’addition de l’abiratérone, associée à la prednisone, par voie orale au traitement standard d’hormonothérapie chez des patients diagnostiqués d’emblée d’un cancer prostatique métastatique grave (Gleason élevé ≥ 8, métastases osseuses ≥ 3 et viscérales) diminue, par rapport au placebo, le risque de décès de 38 % (HR = 0,62 ; IC95 % : 0,51-0,76, p < 0,0001) et le risque de rechute de la maladie de plus de 50 % après 2 ans et demi de suivi (HR = 0,47 ; IC95 % : 039-0,55, p < 0,0001).
« 1200 patients ont été inclus entre février 2013 et décembre 2014. L’objectif principal de cet essai, a expliqué le Pr Fizazi, était de mesurer le bénéfice de l’abiratérone sur la survie globale et la survie sans progression du cancer chez des patients nouvellement diagnostiqués d’un cancer métastatique de la prostate (n = 1199). »
Une amélioration très significative du pronostic
« Les résultats ont démontré que l’ajout de l’abiratérone à l’hormonothérapie conventionnelle, a-t-il poursuivi, améliore non seulement considérablement le pronostic de ces patients (survie globale et survie sans progression de la maladie) mais aussi l’ensemble des complications liées à la maladie (aggravation des symptômes douloureux, progression du PSA et complications liés aux événements osseux). »
« La prednisone était associée à l’abiratérone pour compenser le rétrocontrôle positif au niveau de l’axe hypothalamohypophysaire et la sécrétion d’ACTH conduisant à une hypersécrétion de minéralocorticoïdes responsables d’une hypertension artérielle, d’une hypokaliémie et d’une rétention hydrosodée, » a souligné le Pr Karim Fizazi. L’utilisation d’une corticothérapie ou d’antagonistes des minéralocorticoïdes supprime cette élévation de l’ACTH et les signes d’hyperaldostéronisme.
L’abiratérone bloque la CYP17 (cytochrome P450 c17) de façon irréversible ; « c’est un inhibiteur sélectif de la synthèse des androgènes testiculaires, surrénaliens mais également intratumoraux, complétant ainsi l’action de l’hormonothérapie conventionnelle (agoniste de la LH-RH, antagonistes de la LH-RH), » a précisé l’expert.
Comme l’a indiqué Karim Fizazi, « le profil de tolérance de l’abiratérone est bon. Il faut en début de traitement par l’abiratérone suivre la pression artérielle et la kaliémie. »
Vers un changement de standard thérapeutique ?
Depuis 2015, l’hormonothérapie conventionnelle associée au docetaxel était le nouveau standard thérapeutique pour les patients atteints d’un cancer de la prostate métastatique avec un volume métastatique élevé. Cette stratégie reposait sur les données de la méta-analyse qui avait poolé les résultats de 3 études : JETUG 15, CHAARTED, STAMPEDE et qui avait retrouvé une réduction du risque de décès de 23 % (HR = 0,77). Comme l’a expliqué le Pr Fizazi, « pour les patients qui ont une masse métastatique moins importante (moins de 3 métastases osseuses ou des métastases ganglionnaires), la chimiothérapie est plus discutable car même si on observe une amélioration sur la survie sans progression, il n’y a pas d’impact sur la survie globale. »
« L’abiratérone dans LATITUDE donne des résultats en termes de survie globale jamais observés jusqu’à présent ». 5000 patients devraient pouvoir bénéficier de cette stratégie thérapeutique en France.
La prochaine étape est l’étude européenne PEACE-1 promue par UNICANCER et dirigée par le Pr Fizazi qui évalue l’adjonction de l’abiratérone à une hormonothérapie conventionnelle et à la chimiothérapie. Les premiers résultats sont attendus à partir de 2020.
« D’autres études de phases III évaluent d’autres hormonothérapies de nouvelle génération telles que l’enzalutamide, l’ODM201, l’ARN509 associées à la chimiothérapie chez des hommes qui peuvent recevoir une hormono-chimiothérapie. »
Quid de l’immunothérapie pour ce type de patients ?
« L’immunothérapie a échoué de très peu en phase III avec l’ipilimumab pour ce profil de patients. Toutefois, 15 à 20 % répondent à ce traitement avec une maladie indétectable et un recul de 6 à 7 ans. Ce sont des patients longs survivants. Nous n’avons pas encore identifié le profil de patients pouvant bénéficier pleinement de ce traitement, a ajouté le Pr Fizazi. De nombreuses études sont en cours avec des anti-PD1, des anti-PDL1, des anti-CTLA4.
À suivre donc !
Présentation en session plénière par le Pr Karim Fizazi (urologue, Gustave Roussy) dans le cadre du Congrès ASCO 2017, Abstract n°LBA3 (publié au New England Journal of Medicine le 4 juin 2017).
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