« Aujourd’hui, nous avons deux contraintes : nos patients sont plus à risque de forme sévère du Covid-19 et, si on décale le traitement oncologique, l’impact est immédiat, explique le Pr Jean-Yves Blay, président d’Unicancer. L’enjeu pour eux, est d’éviter les pertes de chance. Il est nécessaire qu’ils soient pris en charge aussi vite que possible. C’est pourquoi nous mettons tout en œuvre pour assurer la continuité de leurs soins et les protéger face au virus ».
En effet, les CLCC ont dû se réorganiser entre le maintien des soins curatifs indispensables et la reprogrammation des activités moins urgentes. Afin de protéger les patients atteints de cancer, l’objectif a été de limiter leurs déplacements, en favorisant les téléconsultations, les chimiothérapies orales et l’hospitalisation à domicile. De plus, les patients ont été informés sur les conditions de prise en charge pendant l’épidémie via les sites internet des Centres, des hotlines, des numéros d’appels et adresses électroniques dédiés. Sur les réseaux sociaux, un hashtag « # CanceretCOVID19 » a également été créé.
Outre la protection de ses personnels soignants et non soignants (port de masques, soutien psychologique), le réseau s’est également mobilisé face à l’urgence, notamment dans les régions les plus touchées. Face à la saturation des capacités de réanimation et d’hospitalisation en Ile-de-France, Gustave Roussy et l’Institut Curie ont dû accueillir respectivement 187 et 218 patients Covid-19, dont certains n’ayant pas de cancer.
Déployer un programme de recherche
« Plusieurs études tendent à démontrer que les patients atteints de cancer ont beaucoup plus de risques de développer une forme sévère du Covid-19 », constate le Pr Blay. Ainsi, un programme d’essais cliniques a été mis en place afin d’évaluer les conséquences du virus sur ces patients et d’éventuels traitements pour leur prise en charge.
L’étude observationnelle ONCOVID-19, menée au sein des 18 CLCC et de nombreux centres hospitaliers, a déjà inclus plus d’une centaine de patients. Elle permettra de recueillir des données afin d’évaluer le risque de complications dues à l’infection en cas de cancer. D’autre part, l’essai randomisé multicentrique ONCOVID-20 teste, chez des patients atteints de cancer, l’efficacité de trois molécules contre le Covid-19 : un dérivé de la chloroquine (GNS651), l'anti-PD-1 nivolumab et l'anti-IL-6 tocilizumab (voir l’interview du Dr Philippe Cassier). Cet essai modulable prévoit l’introduction de nouveaux bras d’immunothérapie dans les semaines à venir.
Pilotée par Gustave Roussy, l’étude SCANcovPCR, cherche à évaluer les performances diagnostiques du scanner thoracique en cas de discordance entre un tableau clinique évocateur de Covid-19 et un test RT-PCR négatif, en oncologie et oncohématologie. Quant à l’essai CORIMMUNO-19, promu par l’AP-HP et avec la participation de Gustave Roussy, il vise à évaluer le rapport bénéfice/risque des immunothérapies, notamment de deux inhibiteurs d’interleukine 6 (tocilizumab et sarilumab), chez les personnes hospitalisées pour un Covid-19.
Mené par le Centre Paul Strauss et l’ICANS de Strasbourg, un essai de phase II teste l’efficacité du LEAF-4L7520 chez des patients sous détresse respiratoire contaminés par le SRAS-CoV-2. Enfin, l’étude EVIDENCE, « Sérodiagnostic Covid-19 et retour aux pratiques de soins normales en cancérologie », pilotée par Unicancer avec l’Institut Curie, ambitionne de déterminer la capacité des sérodiagnostics positifs à prédire l’absence de survenue d’un nouvel épisode symptomatique lié au virus, et de proposer ainsi le retour à la pratique courante de soins chez les sujets positifs.
Anticiper l’effet rebond de l’après confinement
« La plupart des études cliniques réalisées, par exemple pour les cancers du sein, de l’ovaire, ORL et du sarcome font état d’un risque accru de rechute et de mortalité de 20 % par mois de perdu dans la prise en charge », précise le Pr Blay. Cependant, le nombre de consultations diagnostiques diminue, laissant penser que certains patients attendent à domicile. « Il y a dans les mois à venir une période de suractivité qui va être incontournable dans nos établissements car des patients qui ont attendu ne pourront plus attendre », anticipe le Pr Blay. En effet, un rebond d’activité de 20 à 30 % est attendu à la fin du confinement. Les CLCC commencent déjà à s’organiser et à réaugmenter leur activité.
« Le traitement des maladies chroniques est l’enjeu actuel de l’épidémie de Covid-19, alerte le Pr Blay lors de l’Université du Change Management en Médecine (1). Invitons les patients à retourner consulter. Sinon, on risque d’avoir une deuxième vague d’une autre ampleur, en termes de sévérité et de nombre de cas graves, que celle déjà impressionnante que nous subissons ».
D’après le communiqué de presse d’Unicancer (17 avril 2020)
(1) D’après l’interview du Pr Jean Yves Blay par Pascal Maurel lors de l’émission UC2m (16 avril 2020).
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