Les premières études probantes sur le dépistage par l'haleine utilisaient le flair de chiens dûment entraînés, à reconnaître des métabolites exhalés associés à la présence d'un cancer bronchopulmonaire. Malgré des résultats prometteurs, l’application de cette stratégie à un dépistage à grande échelle restait difficile à imaginer, même en la restreignant à une population cible. Ainsi, dans la lignée de l'engouement pour la e-santé et l’intelligence artificielle, des e-nez ont été développés…
Une cinquantaine d'études de faisabilité
Selon une revue récemment publiée (1), la recherche dans diverses bases de données a permis d'identifier une cinquantaine d'études cliniques (52) sérieuses menées entre janvier 2000 et juillet 2021. Si au total plus de 3 500 patients souffrant de cancer ont été inclus, il ne s’agit pour l’instant que d’études de faisabilité, portant chacune sur 10 à 351 sujets.
Au niveau technologique, les e-nez les plus utilisés sont le Cyranose 320 (12 études) et l'Aenose (11 études), suivis du PEN3 (3 études). Les capteurs étudiés sont principalement à base d'oxyde métallique. Mais certains essais évaluent des capteurs à micro-balance de quartz, à polymères conducteurs, ou à base de divers nanomatériaux. De plus, 14 études utilisent un e-nez fonctionnant directement sur l'air expiré. Enfin, dans 34 études, l'air expiré doit être recueilli dans un « sac échantillon ».
D’un point de vue clinique, les cancers dépistés sont majoritairement pulmonaires (28 études), avec une interruption du tabac (de durée variable) imposée dans presque moitié des essais. Mais de nombreux autres types de cancers ont été testés : mésothéliomes (3 études), cancers de la tête et du cou (5 études), gastriques (4 études), du sein (4 études), colorectaux (4 études), de la cavité orale (2 études), ovariens (1 étude) et prostatiques (1 étude).
Une importante capacité de dépistage à explorer
Au sein de ces études, la sensibilité varie de 50 % à 96 % et la spécificité de 10 % à 100 %. Néanmoins, l'analyse poolée des données fait apparaître une sensibilité moyenne autour de 90 % (88-92), associée à une spécificité d’environ 87 % (81-92). Il existe cependant une grande hétérogénéité entre les études, liée à la sélection des patients, à des facteurs endogènes et exogènes, ainsi qu'à la méthode de recueil de l'air expiré. Par exemple, une analyse séparée des 12 études menées dans le cancer pulmonaire, avec le e-nez Cyranose 320, met en évidence une sensibilité de 93 % (85-97) et une spécificité de 89 % (72-96), concernant leur capacité de dépistage. Pour l'Aenose, la sensibilité s’élève à 88 % (83-92) et la spécificité à 70 % (57-80), selon l’analyse combinée de 11 études.
« Ces e-nez ont manifestement un haut potentiel pour dépister la présence de cancers, via l'analyse de l'air expiré. Néanmoins, il ne s’agit pour l'instant que d’études de faisabilité, de taille réduite, manquant de standardisation et à haut risque de biais. Ce manque de standardisation et de reproductibilité des essais reste donc à explorer avant de crier victoire », résument les auteurs.
(1) HMC Scheepers M et al. Using Exhaled Breath: A Systematic Review and Meta-analysis. JAMA Network Open. 2022;5(6):e2219372.
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