Pour le deuxième débat public organisé par l’IPC, Dominique Maraninchi et son comité de pilotage ont proposé de réfléchir à l’évolution de la prise en charge du cancer « hors les murs de l’Hôpital ».
Cette réflexion s’impose avec les changements provoqués par l'arrivée des nouvelles technologies et les nouveaux traitements en ambulatoire tant pour la chirurgie que pour les chimiothérapies orales. Avec le numérique, ces transformations poussent à envisager un futur où le patient atteint de cancer ne séjourne presque pas à l’hôpital, et ne s’y rend que 3 à 4 fois pendant son traitement.
« Ce cancer hors les murs, c’est déjà une réalité qui va encore se développer ces prochaines années grâce au numérique, explique le Pr François Bertucci, oncologue médical. Et ce pour des raisons épidémiologiques, avec une file active de patients de plus en plus importante, des raisons économiques et médicales. »
La e santé pour une nouvelle organisation
Le spécialiste cite l'étude EVOLPEC, « quelle prise en charge des cancers en 2020 au sein des centres de lutte contre le cancer », réalisée par UNICANCER qui montre 6 évolutions structurantes qui vont dans ce sens du hors les murs : « Ainsi, la prise en charge des patients va évoluer vers une diminution du nombre et/ou de la durée des séjours hospitaliers avec une succession d’interventions pluridisciplinaires très spécialisées à des temps pré-définis (consultations, actes diagnostiques et thérapeutiques ambulatoires) et plus de soins à domicile. Ce qui nécessitera un accompagnement nouveau et une surveillance adaptée "à distance" assurant la continuité des soins et du suivi en toute sécurité. » Des exemples existent d’assistance téléphonique - deux appels par semaine d’infirmière pour des patients atteints de Lymphome dans un centre toulousain - ou d’utilisation de la e santé, regroupant télémédecine, objets connectés… « Mais tout cela demande une réorganisation profonde de l’hôpital et des formations qui sont à réinventer. Comme le concept de chemin clinique pour une meilleure prise en charge en ambulatoire, une organisation architecturale reprenant la marche en avant ou le développement de l’éducation thérapeutique, explique Anne Gaëlle le Coroller, chargée de recherche au SESSTIM. Cela nécessite de repenser le chemin de soins des patients avec de nouveaux modes de prise en charge centrés autour des patients. »
La relation humaine toujours essentielle
C’est bien là toute la question de cette nouvelle organisation à construire et qui inquiète les patients. Des membres du comité des patients se sont fait l’écho de l’appréhension des malades toujours plus isolés « au moins dans les salles d’attente, on peut parler entre nous », et des inégalités quant à l’accès aux soins à cause de la fracture numérique. La relation humaine doit rester essentielle dans le processus de soins. Car, souligne Bernadette Devictor, présidente de la conférence nationale de santé, « l’observance des traitements ne vient que s’il y a adhésion au processus thérapeutique. Ce qui rend l’investissement dans une démarche pro-active sur la maladie plus favorable ». Sur l'impact humain de ce hors les murs, elle indique : « Nous arriverons à dépasser les conflits d’objectifs et de représentation en conservant le dialogue et une relation humaine de qualité. » Ajoutant à propos de la santé connectée « jusqu’où devons-nous accepter ces prises de contrôles à distance ? »
Penser différemment la médecine et le soin
Pour Patrick Ben Soussan, psychiatre, qui dirige le département de psychologie clinique de l’IPC, « Il ne s’agit pas de déplacer le secteur hospitalier au domicile ». « Une vie de malade » ne signifiant pas « que leur vie est malade. Il faut penser différemment la médecine et le soin pour être plus humain. » Selon lui, le hors les murs de l’hôpital sera soit « le renouvellement des outils, le renouveau de nos humanités, ce à quoi on s’engage ici par ce débat » ou « une façon pernicieuse voire perverse de gérer comme le disait Foucault, la police de la santé ». Le débat ne fait que commencer…
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