A PRIORI, hormis leur origine hématologique, rien de commun entre une anémie réfractaire et une splénomégalie myéloïde. Et pourtant… L’équipe Inserm U790 dirigée par le Dr François Delhommeau vient de montrer qu’un mécanisme génétique très précoce serait commun à la fois aux syndromes myéloprolifératifs, myélodysplasiques et leucémies aiguës myéloïdes. Des mutations du gène TET2 ont été retrouvées en effet dans 15 % de ces cancers hématologiques. Les travaux de l’équipe française permettent de mieux comprendre comment se développent les maladies myéloïdes. Loin de contredire les théories antérieures, ces résultats viennent corroborer le modèle du célèbre hématologue Nowell qui a découvert le chromosome Philadelphie dans la leucémie myéloïde chronique dans les années 1960 : de multiples phénotypes tumoraux pourraient être issus d’une même lésion initiale.
De multiples tests génétiques.
Si les cancers myéloïdes sont associés à un trouble de la production des cellules myéloïdes, les mécanismes responsables sont mal connus. Les syndromes myéloprolifératifs sont caractérisés par une surproduction, les syndromes myélodysplasiques par une diminution d’une ou plusieurs lignées cellulaires et les leucémies aiguës myéloïdes par une disparition de la différenciation en granulocytes matures. François Delhommeau et coll. ont eu l’idée de comparer les analyses génétiques de 320 patients atteints de ces maladies afin d’identifier un gène suppresseur de tumeur commun. C’est en réalisant des tests PCR moléculaires et cytogénétiques, des hybridations génomiques comparatives et des analyses de polymorphismes que les chercheurs ont finalement réussi à pointer le gène TET2. Des mutations de ce gène étaient présentes chez 15 des 81 patients ayant un syndrome myélodysplasique (19 %), chez 24 des 198 ayant un syndrome myéloprolifératif (12 %), chez 5 des 21 ayant une leucémie aiguë myéloïde (24 %) et chez 2 des 9 ayant une leucémie myélomonocytaire chronique (22 %).
À un stade précoce de l’hématopoïèse.
De plus, les scientifiques ont montré que les mutations de TET2 survenaient à un stade précoce des cellules souches hématopoïétiques et précédaient même la mutation JAK2 V617F, souvent associée aux syndromes myéloprolifératifs. Pour tester cette hypothèse, les chercheurs ont greffé à des souris immunodéficientes des cellules de moelle osseuse de patients atteints de syndrome myéloprolifératif et porteurs des deux mutations. Les populations cellulaires les mieux développées présentaient la mutation TET2 mais pas JAK2 V617F. Ces résultats suggèrent que les cellules souches mutées pour TET2 donnent des cellules non malignes qui le deviennent par la suite. La fonction exacte du gène TET2 à l’état non muté n’est pas connue, mais les travaux français suggèrent un rôle au cours de l’hématopoïèse dans l’équilibre entre survie, croissance et différenciation. De même, il serait intéressant de déterminer si la mutation du gène entraîne un avantage prolifératif, une instabilité génomique ou d’autres fonctions inattendues. La piste du TET2 a encore de beaux jours devant elle, ce d’autant qu’il pourrait y avoir des conséquences thérapeutiques avec les inhibiteurs JAK2, actuellement à l’essai.
N Engl J Med 360 ; 22, 28 mai 2009.
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