Les pistes du Pr Vernant pour le 3e plan cancer

Mieux impliquer du médecin traitant

Publié le 02/09/2013
Article réservé aux abonnés
1378115545450341_IMG_109714_HR.jpg

1378115545450341_IMG_109714_HR.jpg
Crédit photo : Cocktail santé

« LES DEUX PREMIERS plans cancer ont été à l’origine de progrès majeurs dans le domaine de l’organisation de la recherche comme dans celle des soins », souligne le Pr Vernant, hématologue à la Pitié Salpêtrière, dans son rapport. Le 3e plan cancer « doit poursuivre les actions entreprises mais doit également anticiper les nouvelles organisations qu’imposeront les innovations thérapeutiques en permanent développement ».

Parmi ces évolutions, il cite les « hospitalisations conventionnelles de plus en plus courtes » mais qui sont l’occasion de soins de haute technicité nécessitant des équipements sophistiqués (anatomocytopathologie, informatique, imagerie, radiothérapie). « Les métiers de la cancérologie devront s’adapter à ces nouvelles exigences et une gradation des soins tant médicaux que chirurgicaux devra être mise en place », indique-t-il. Par ailleurs, explique-t-il, « la majeure partie du parcours de soins se déroulera en ambulatoire, ce qui nécessite de repenser d’emblée les rapports hôpital – ville, avec la création de nouvelles fonctions professionnelles d’interface, et une implication croissante du médecin traitant et des autres professionnels de santé proches du domicile, ainsi que des malades eux-mêmes ».

Réduction des inégalités.

Trois grands objectifs sont proposés : la réduction sensible et objective, en 10 ans, des inégalités de santé suivie par 4 indicateurs (la mortalité prématurée par cancer, les inégalités de participations au dépistage des cancers, le surrisque de mortalité des cancers chez les personnes de plus de 75 ans, les inégalités de survie) ; les adaptations du système de santé et de son financement (évolutions des pratiques, des métiers et des équipements) ; la simplification de l’organisation. L’INCa devrait conserver toutes ses responsabilités nationales tandis que les cancéropôles auront de larges responsabilités interrégionales et que les anciens réseaux régionaux se transformeront en délégation régionale sous la tutelle des cancéropôles. « Ces mesures sont plutôt de nature à générer des économies de moyens et permettront de donner plus de visibilité et plus d’efficacité avec de plus, davantage de cohérence entre les soins et la recherche », commente pour le « Quotidien » le Pr Véronique Trillet Lenoir, cancérologue aux hospices civils de Lyon, qui a participé à la rédaction du rapport.

Parmi les pistes présentées dans les 5 axes thématiques : prévention et dépistage ; recherche ; les métiers, les formations et pratiques de la cancérologie ; le parcours de soins ; la vie avant et après le cancer. Le rapport propose de modifier l’approche de la prévention et de « passer d’une prévention prescriptive fondée sur les interdictions à une prévention éducative ». « La meilleure prévention contre les comportements à risques est l’éducation plutôt que la coercition », résume le Pr Vernant qui propose que l’éducation à la santé se fasse dès l’école afin d’obtenir une réduction acceptée des comportements à risques.

Devant l’échec de la lutte contre le tabac, il souhaite un plan de lutte « volontariste et continue ». La mise en place des paquets neutres dans les deux ans et le remboursement à 100 % des substituts nicotiniques pendant 3 essais d’arrêt figurent parmi les mesures proposées. Le rapport recommande par ailleurs que l’intérêt de la cigarette électronique dans la politique de sevrage soit évalué. Concernant le dépistage (cancer du sein et cancer colorectal), le rapport souhaite une meilleure implication du médecin traitant dans les procédures d’invitation et dans le suivi. Il préconise le financement d’une consultation de prévention consacrée entre autres à l’explication et à l’invitation aux dépistages organisés. Sur le dépistage du cancer de la prostate, le rapport recommande l’application des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) et souhaite que le remboursement du dosage des PSA, réalisé sans signe d’appel clinique chez les hommes sans risque élevé, soit supprimé.

Au chapitre consacré à la vie pendant et après le cancer, le Pr Vernant une consultation systématique de fin de traitement réunissant l’oncologue référent, l’infirmier coordonnateur, un psychologue et aussi le médecin traitant du patient en question. Il préconise que le système post ALD (exonération du ticket modérateur sur demande du médecin traitant) soit étendu à 2 bilans post guérison à 2 et à 5 ans après la sortie en ALD.

Rôle du médecin traitant, un axe prioritaire

Cinq axes transversaux sont identifiés comme prioritaire. Le premier concerne le rôle du médecin traitant. « C’est un des points forts de ces recommandations, souligne le Pr Véronique Trillet Lenoir. C’était une absence du premier plan, un vœu pieu du deuxième qui n’a pas vraiment été suivi d’effets. Là l’accent est mis sur l’implication des médecins généralistes dans la prévention et le dépistage mais aussi dans le parcours de soins compte tenu du caractère de plus en plus ambulatoire des thérapeutiques du cancer ». Pour cela, différentes mesures visent à mieux l’informer (transmission des données du patient par voir informatique sécurisée, numéro de téléphone dédié pour joindre un membre de l’équipe...).

De même, sont jugés prioritaire la meilleure implication des patients, l’amélioration du système d’information (mise en place d’un dossier communicant de cancérologie, DCC), l’évolution de l’organisation, tout comme les solutions apportées aux problèmes économiques comme « d’imposer dans les secteurs libéraux et publics l’absence de reste à charge pour les patients atteints de cancer » lors des dépistages, des soins du cancer et de l’après cancer.

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9259