PAR LE Dr LAURENCE DESJARDINS*
LE RÉTINOBLASTOME est une tumeur rétinienne maligne intraoculaire touchant essentiellement le nourrisson et le jeune enfant. C’est une tumeur d’origine génétique. Au niveau cellulaire, deux mutations du gène Rb sont nécessaires à son développement. Dans les formes héréditaires, il existe une mutation constitutionnelle sur le bras long du chromosome 13. Les formes bilatérales et 15 % des formes unilatérales sont héréditaires, transmissibles à la descendance selon un mode autosomal dominant. Pour 85 % des formes unilatérales, les deux mutations nécessaires se produisent dans les cellules rétiniennes donnant alors une forme unilatérale unifocale, non transmissible à la descendance. La moyenne d’âge au diagnostic est de un an pour les bilatéraux et deux ans pour les unilatéraux.
Pour le diagnostic précoce du rétinoblastome, Il faut distinguer deux situations.
En l’absence d’antécédent familial de rétinoblastome.
Les signes cliniques initiaux de la maladie sont le strabisme et la leucocorie. Le strabisme est le signe le plus précoce. Au cours des six premiers mois de vie, le rétinoblastome, s’il se développe, est localisé au niveau du pôle postérieur de l’œil, souvent sur le centre de la rétine ou de la macula. Ainsi, une tumeur de seulement 2 à 3 mm de diamètre peut provoquer un strabisme d’origine organique. Il faut bien distinguer ce strabisme, qui est en général permanent et unilatéral, du strabisme accommodatif du nourrisson, qui est bilatéral et intermittent. La règle pour les ophtalmologistes est l’examen du fond d’œil chez tout enfant strabique. Un examen précoce peut parfois diagnostiquer des tumeurs de petite taille qui sont accessibles à un traitement conservateur de l’œil (figures 1 et 2).
La leucocorie, ou reflet blanc dans la pupille, est un signe plus tardif témoignant déjà d’une tumeur plus évoluée. Elle peut être visible sur les photographies au flash lorsque l’on n’utilise pas le système anti-yeux rouges (figure 3). Dans ce cas, quand il existe un rétinoblastome unilatéral, il existe une pupille blanche sur l’œil malade alors que sur l’œil sain la pupille est orangée. Au début, la leucocorie peut ne pas être constante, visible avec certains éclairages et seulement dans certaines directions du regard. Il faut savoir écouter les parents ou l’entourage qui décrivent ce symptôme, ne pas le banaliser et
pratiquer rapidement un examen du fond d’œil.
Si le rétinoblastome n’est pas diagnostiqué au stade de leucocorie, le tableau s’aggrave rapidement avec apparition, d’une inflammation, d’une hypertonie avec buphtalmie (distension sclérale), voire d’une exophtalmie, parfois inflammatoire, parfois liée à l’envahissement de l’orbite par la tumeur. Ces tableaux sont rares en France, mais fréquents dans les pays en voie de développement.
Quand il existe un antécédent familial de rétinoblastome.
Quel que soit cet antécédent, une consultation de génétique est indispensable en cas de grossesse. Si l’un des parents a eu un rétinoblastome bilatéral, on peut dans 90 % des cas identifier la mutation causale. Les parents peuvent alors décider d’un diagnostic anténatal, sinon le diagnostic peut être fait à la naissance de l’enfant sur le sang du cordon ombilical. Un enfant porteur d’une mutation constitutionnelle du gène Rb, doit avoir un suivi mensuel du fond d’œil. Il est possible de faire le fond d’œil sans anesthésie générale (AG) pendant les premiers mois de vie car les tumeurs qui se développent sont alors postérieures. A partir de 4 mois, l’AG est indispensable. Plus l’enfant grandit, plus les tumeurs se développent en périphérie de la rétine et à partir de un an, elles sont souvent localisées en arrière de l’ora serrata. Un diagnostic précoce des tumeurs de moins de 1 mm permet de les traiter facilement par laser ou cryothérapie sans avoir recours à la chimiothérapie ou à l’irradiation.
Si l’un des parents a eu un rétinoblastome unilatéral, le risque est moindre, mais l’absence de mutation identifiée n’élimine pas complètement le risque et le suivi des enfants est indispensable avec un rythme adapté (tous les deux ou trois mois).
Si l’antécédent de rétinoblastome est survenu chez un frère ou une sœur, la mutation identifiée chez l’enfant atteint permet parfois de lever la surveillance de la fratrie. Parfois, on peut faire une étude indirecte (voir s’il existe des allèles communs chez les frères et sœurs). Quelquefois une surveillance trimestrielle est nécessaire.
Si l’antécédent de rétinoblastome est survenu chez un oncle, une tante, un cousin, il faut toujours recommander une consultation de génétique, une recherche de mutation. Et c’est seulement après cette enquête approfondie que l’on peut ou non recommander un suivi du fond d’œil pour dépistage.
*Institut Curie
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