Une patiente de 21 ans avec pour seul antécédent une épilepsie dans l'enfance, est hospitalisée dans le service de rhumatologie à cause de douleurs lombaires basses avec irradiation dans les fesses, apparues brutalement il y a huit mois. Ses douleurs sont d'horaire inflammatoire et ne cèdent pas à la prise de paracétamol. Deux mois plus tard, des adénopathies cervicales bilatérales apparaissent, ainsi que des épisodes de fièvre et des sueurs nocturnes.
Un syndrome inflammatoire avec adénomégalies…
À l'examen physique, la patiente n'a pas de syndrome rachidien, radiculaire ou de signe d'irritation pyramidale.
Le bilan biologique retrouve un syndrome inflammatoire important avec un taux de protéine C réactive à 109 mg/l, de plaquettes (NFS) et de lactate déshydrogénases normaux.
Le scanner thoraco-abdomino-pelvien et le TEP scanner montrent de multiples adénomégalies sus et sous-diaphragmatique bilatérales diffuses, fortement hypermétaboliques. Le TEP scanner met également en évidence une atteinte osseuse avec de multiples foyers intensément hypermétaboliques disséminés sur le rachis cervico-dorso-lombaire, le gril costal, scapulaire et de la tête humérale gauche, le bassin et la partie proximale des fémurs.
[[asset:image:7506 {"mode":"full","align":"","field_asset_image_copyright":["DR"],"field_asset_image_description":["Coupe sagittale du rachis entier "]}]]Une biopsie de l'adénopathie cervicale est réalisée sous échographie permettant de poser le diagnostic de lymphome de Hodgkin (LH).
La patiente est hospitalisée en hématologie où un traitement par chimiothérapie est débuté à raison de deux cures de BEACOD puis quatre cures d'ABVD.
Lymphome hodgkinien et atteintes osseuses de mauvais pronostic
Avec environ 2 000 nouveaux cas en France chaque année, le LH est un cancer relativement rare. Il se développe selon deux pics de fréquence, chez les adolescents et les jeunes adultes entre 15 et 35 ans, ou les sujets âgés de plus de 70 ans.
Le LH se caractérise par la prolifération de cellules anormales développées à partir d'un lymphocyte B, identifiées comme des cellules de Reed Sternberg.
La maladie se manifeste le plus souvent par l'apparition d'adénopathies cervicales indolores de siège cervical ou sus-claviculaire. Elle peut également être découverte par des adénopathies médiastinales mises en évidence sur un cliché thoracique réalisé de manière fortuite ou par la présence de signes généraux, tels que la fièvre, un amaigrissement, des sueurs nocturnes et plus rarement un prurit. Un signe clinique révélateur est l'apparition de douleurs à l'ingestion d'alcool.
Il existe quatre stades de développement, de I à IV, en fonction de l'étendue de la maladie des deux côtés du diaphragme et de l'atteinte, ou non, d'un organe lymphoïde. Les atteintes osseuses sont caractéristiques d'un LH de stade IV, avec un pronostic défavorable (1). Elles révèlent soit un LH osseux primitif, soit une atteinte médullaire, soit des localisations osseuses secondaires.
Le LH osseux primitif est exceptionnel, caractérisé par la présence d'une lésion osseuse unique.
L'atteinte médullaire du LH est la localisation la plus fréquente, présente d'emblée dans 15 % des cas (2). Sur les radiographies ou au scanner, les lésions médullaires peuvent facilement passer inaperçues. À l'IRM, les lésions sont souvent caractéristiques montrant une diminution du signal de la moelle osseuse sur les séquences pondérées en T1, un hypersignal de la lésion sur la séquence STIR et un rehaussement intense sur la séquence T1 avec suppression de la graisse après injection de Gadolinium (3). L'atteinte médullaire est fondamentale à détecter car elle modifie la prise en charge thérapeutique en ne reposant que sur une chimiothérapie seule dans les stades avancés. En effet, le LH est souvent découvert au stade localisé (stade I ou II) et peut être traité par une association de chimiothérapie et de radiothérapie. Afin de ne pas méconnaître ces lésions, le TEP TDM est un examen fondamental dans le bilan d'extension (4).
Les localisations osseuses secondaires du LH sont le plus souvent dues à une extension par contiguïté à partir d'une masse ganglionnaire ou de manière plus rare, à une véritable lésion osseuse par voie hématogène. Ces lésions peuvent être lytiques ou condensantes (5).
Le traitement repose sur une association chimiothérapie et radiothérapie pour les stades localisés (I et II) et une chimiothérapie seule pour les stades avancés. La chimiothérapie se compose d'anthracyclines, d'alkylants, de vincristine, d'étoposide et d'une corticothérapie. De nouvelles thérapeutiques sont en plein essor, notamment les thérapies ciblées qui font maintenant partie intégrante de la prise en charge des patients adultes ne répondant pas aux traitements classiques. Les inhibiteurs de point de contrôle (checkpoint) immunitaire sont en cours d'essai chez les patients en rechute d'un traitement conventionnel (6).
Centre Viggo Petersen, hôpital Lariboisière (Paris).
(1) Carbone PP, Kaplan HS, Musshoff K, et al. Report of the Committee on Hodgkin’s Disease Staging Classification. Cancer Res. nov 1971;31(11):1860‑1.
(2) O’Carroll DI, McKenna RW, Brunning RD. Bone marrow manifestations of Hodgkin’s disease. Cancer. oct 1976;38(4):1717‑28.
(3) Cheson BD. Role of functional imaging in the management of lymphoma. J Clin Oncol Off J Am Soc Clin Oncol. 10 mai 2011;29(14):1844‑54.
(4) Imagerie rhumatologique et orthopédique 2013 Atteintes osseuses au cours du lymphome, Tome 1:444-8.
(5) Edeiken-Monroe B, Edeiken J, Kim EE. Radiologic concepts of lymphoma of bone. Radiol Clin North Am. juill 1990;28(4):841‑64.
(6) Amraee A, Evazi MR, Shakeri M, et al. Efficacy of nivolumab as checkpoint inhibitor drug on survival rate of patients with relapsed/refractory classical Hodgkin lymphoma: a meta-analysis of prospective clinical study. Clin Transl Oncol. 2019 Feb 9. doi: 10.1007/s12094-018-02032-4.
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