En pratique

Comment prescrire les inhibiteurs du SGLT2 ?

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Publié le 26/05/2023
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Traitement essentiel de l'insuffisance cardiaque (IC), les inhibiteurs du cotransport sodium-glucose de type 2 (iSGLT2) ont démontré leurs bénéfices quelle que soit la fraction d'éjection (FE). Simple d’utilisation en pratique, quelques règles de prescription sont néanmoins à respecter.
Un traitement ubiquitaire de l'insuffisance cardiaque, quelle que soit la fraction d'éjection

Un traitement ubiquitaire de l'insuffisance cardiaque, quelle que soit la fraction d'éjection
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Les iSGLT2 sont devenus un traitement ubiquitaire de l'IC quelle que soit la FE, grâce à leur action natriurétique et diurétique originale. En effet, ils agissent sur le tubule proximal du néphron, où 65 % du sodium filtré est réabsorbé, et ont des effets pléiotropes pouvant participer à leurs actions cardio- et néphroprotectrices.

Un bénéfice indépendant de la fraction d’éjection

Dans l'IC à FE réduite (FE ≤ 40 %), au cours de la méta-analyse des essais DAPA-HF et EMPEROR-Reduced, la dapagliflozine et l'empagliflozine (10 mg) ont réduit de 13 % la mortalité totale, de 14 % les décès cardiovasculaires (CV), de 31 % le risque de première hospitalisation pour IC et de 48 % les événements rénaux, bénéfices indépendants du statut glycémique des patients. Ces résultats ont conduit à une recommandation de classe I et de niveau A, pour leur utilisation en première intention dans le traitement de l'ICFE réduite.

Dans l'ICFE préservée (FE < 50 %) ou modérément réduite (FE entre 41 et 49 %), au cours de la méta-analyse des essais EMPEROR-Preseved et DELIVER, l'empagliflozine et la dapagliflozine (10 mg) ont réduit de 24 % les hospitalisations pour IC et de 12 % les décès CV (non significativement pour ce dernier paramètre). Ces résultats sont homogènes, quel que soit le percentile de distribution de la FE : 41-49 %, 50-59 %, ≥ 60 %.

Dans l'IC aiguë, quelle que soit la valeur de la FE, les iSGLT2 introduits rapidement après une décompensation diminuent également le risque de morbimortalité CV. Des études sont en cours pour déterminer leur place dès l'admission des patients.

Une simplicité d’utilisation

Les modalités d'utilisation des iSGLT2 sont particulièrement simples : une dose unique quotidienne de 10 mg par voie orale, sans titration secondaire, administrable jusqu'à un débit de filtration glomérulaire (DFG) de 20 ml/min, en association à tous les autres traitements de l'IC. À la différence des autres diurétiques, ils diminuent l'uricémie et n'induisent pas de variation de la kaliémie. Quant à la baisse très modérée du DFG observée en début de traitement (de l'ordre de 5 ml), elle ne fait que traduire leur effet hémodynamique intrarénal. En effet, ils diminuent initialement le DFG en provoquant une vasoconstriction de l'artériole afférente du glomérule, secondaire à la mise en jeu induite de la balance tubuloglomérulaire, expliquant leur effet néphroprotecteur à moyen terme. Si après leur prescription, le DFG baisse en dessous de 20 %, ils peuvent être poursuivis jusqu'à une éventuelle prise en charge en dialyse. Au cours de l'IC, leurs effets secondaires sont exceptionnels, dominés par le risque d'infection fungique génitale (notamment chez l'homme), nécessitant d'en informer les patients afin qu’ils suivent une bonne hygiène intime.

Respecter certaines règles

Néanmoins, quelques règles de prescription s'imposent. Ils ne peuvent pas être utilisés chez les diabétiques de type I ou les patients insulinopéniques, en raison du risque d'acidocétose euglycémique. De plus, leur arrêt temporaire est préconisé dans les situations de jeûne prolongé (intervention chirurgicale) ou de maladies aiguës. Chez les diabétiques de type II, leur utilisation peut nécessiter, du fait de leur effet hypoglycémiant modéré, de diminuer les doses des médicaments insulinosécréteurs, comme les sulfamides ou les glinides. Lors de leur introduction, la réduction d'une posologie antérieure de diurétique de l'anse ne s'impose pas, mais la posologie de furosémide peut être diminuée chez les patients euvolémiques. Quant à leur association avec les antagonistes des récepteurs minéralocorticoïdes, elle est excellente.

Ainsi, en l'absence de leurs exceptionnelles contre-indications, les iSGLT2 doivent être prescrits chez tous les patients insuffisants cardiaques, avant même de connaître leur FE.

CHU de Toulouse

Pr Michel Galinier

Source : Bilan Spécialiste