Rétro 2019 : cardiologie

Dans la sténose aortique sévère, le TAVI démontre son intérêt chez le patient « tout-venant » dès 65 ans

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Publié le 23/12/2019

Les résultats de deux essais cliniques récents ouvrent la voie d'une extension des indications du TAVI aux patients à moindre risque, dès 65 ans et, en particulier, chez ceux de plus de 75 ans.

Ses indications s’étendent dorénavant aux patients atteints de rétrécissement aortique sévère

Ses indications s’étendent dorénavant aux patients atteints de rétrécissement aortique sévère
Crédit photo : Phanie

Effectué pour la première fois en 2002 par l'équipe du Pr Alain Cribier au CHU de Rouen, le Transcatheter Aortic Valve Implantation (TAVI) connaît une impressionnante expansion mondiale avec environ 400 000 valves implantées à ce jour.

Ce geste, qui consiste à implanter une valve aortique percutanée par voie fémorale, est désormais autorisé aux États-Unis chez tous les patients de plus de 65 ans présentant une sténose aortique sévère. L'autorisation de la Food and drug administration (FDA) pour la réalisation d’un TAVI - jusqu’alors limitée aux patients à haut risque chirurgical ou à risque intermédiaire - a été étendue en septembre dernier aux patients à faible risque chirurgical, à la suite de travaux publiés début 2019, dans « The New England Journal of Medicine ».

« Il s’agit de deux études cliniques de phase 3 randomisées, menées sur 2 ans avec la valve expansible par ballonnet SAPIEN 3 d’Edwards LifeSciences pour l’une (Étude PARTNER 3 sur 1 000 patients) (1) et avec la valve auto-expansible Medtronic Evolut (Étude Medtronic CoreValve Low Risk) (2) pour l’autre, chez des patients à bas risque de plus de 65 ans », souligne la Pr Hélène Eltchaninoff, chef du service de cardiologie du CHU de Rouen. Tous présentant un rétrécissement aortique sans comorbidités. « Ces 2 études montrent que le TAVI est au moins aussi efficace et, dans certains cas, plus efficace que la chirurgie classique sur des critères de mortalité, d’AVC ou de réhospitalisation », précise la Pr Eltchaninoff.

Un gain de confort pour les patients à bas risque

Alternative à la chirurgie classique, le TAVI est aujourd'hui réservé en France, aux patients jugés inopérables, à très haut risque chirurgical (grand âge, patients présentant des comorbidités importantes, notamment rénales…) et à certains patients à risque intermédiaire (comorbidités moins importantes). Le traitement chirurgical nécessite une opération lourde avec ouverture du thorax au niveau du sternum et circulation extracorporelle permettant d'arrêter le cœur durant l'intervention.

Le TAVI, quant à lui, est réalisé sous anesthésie locale, avec une simple ponction au pli de l'aine. Les patients peuvent sortir de l'hôpital dès le lendemain ou le surlendemain de l'intervention. « Les patients qui présentent une sténose aortique ont, le plus souvent, plus de 75 ans. Plus ils cumulent les cormorbidités, plus la chirurgie classique comporte des risques. Pour les patients multimorbides, le TAVI est donc, à l’évidence, préférable. Ces deux nouvelles études de phase 3 montrent, par ailleurs, que le TAVI est aussi efficace chez les patients plus jeunes, sans comorbidités. Même s’ils ne présentent pas de risques chirurgicaux particuliers, ces patients pourraient opter pour le TAVI pour obtenir un gain de confort et des suites opératoires plus simples », indique la Pr Eltchaninoff.

Des questions qui restent en suspens

En France, les démarches en vue du remboursement du TAVI, chez les patients à faible risque, devraient être mises en place en 2020. Enfin, si les résultats des essais cliniques concernant ces patients sont positifs, plusieurs questions restent en suspens : une valve aortique percutanée dure-t-elle aussi longtemps qu'une bioprothèse chirurgicale ? Peut-on aborder les artères coronaires après TAVI, pour pose d’un stent par exemple, aussi facilement qu'après une procédure chirurgicale ?

« Lorsque l'on implante une valve aortique à un patient de 65 ans, son espérance de vie est de l’ordre de 30 ans. Or, la durée de fonctionnement d’une valve aortique percutanée reste incertaine, mais pourrait être d’une dizaine d’années. Que faire ensuite ? Implanter une autre valve percutanée à l’intérieur de la première est possible, mais au-delà, nous n’en savons rien. En raison de ces incertitudes, il est à mon sens plus prudent de limiter le TAVI aux patients de plus de 75 ans (plutôt que 65 ans), jusqu’à ce que l’on en sache davantage sur la durabilité de ces valves », conclut la Pr Eltchaninoff.

(1) MJ Mack  et al., N Engl J Med. doi: 10.1056/NEJMe1902214, 2019.
(2) J Popma et al., N Engl J Med doi: 10.1056/NEJMoa1816885, 2019

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Le Quotidien du médecin