Le type de la protéine amyloïde impliquée dans la formation des dépôts détermine la classification des amyloses. Au niveau cardiaque, les formes les plus fréquentes sont les amyloses AL (L pour chaîne légère) associées aux gammapathies monoclonales ou au myélome et les amyloses à transthyrétine (ATTR), héréditaires (20 %) ou séniles (80 %).
«L'amylose est partout, à condition de la rechercher », alerte le Pr Thibaud Damy (CHU Henri Mondor, Créteil). Les études concernant sa prévalence se multiplient. L'amylose serait impliquée dans 8 % des cardiomyopathies hypertrophiques, 11 % des hypertrophies ventriculaires gauches (HVG) à FEVG altérée, 13 % à 15 % des insuffisances cardiaques (IC) à fonction systolique préservée et 11 % des rétrécissements aortiques calcifiés, selon les données les plus récentes. De plus, jusqu'à 22 % des rétrécissements aortiques requérant un TAVI ont une amylose sénile.
La scintigraphie osseuse, élément clef du diagnostic
L'IRM donne des arguments en faveur d'une amylose, mais n'en précise pas le type. « La scintigraphie réalisée avec des traceurs osseux doit être interprétée en fonction du bilan biologique, électrophorèse des protides, immunofixation, dosage des chaînes légères, protéinurie de Bence Jones », insiste le cardiologue. Une fixation myocardique intense à la scintigraphie est en faveur d’une ATTR mais l’absence de fixation ne permet pas d’éliminer une amylose (7,7 % des AL ont une fixation cardiaque). Une fixation cardiaque en l'absence de gammapathie doit être complétée par un test génétique pour distinguer amylose sénile ou héréditaire. En présence d'une gammapathie avec ou sans fixation cardiaque, l'AL doit être confirmée par une biopsie. En l'absence de gammapathie et de fixation cardiaque, si on suspecte une amylose, une ATTR ne peut être exclue, surtout si la biopsie extracardiaque retrouve des dépôts amyloïdes.
La scintigraphie va probablement s'imposer chez tous les patients avant un TAVI et ceux atteints de cardiomyopathie avec HVG. Une étude est en cours pour analyser les conséquences d'une ATTR sénile sur le TAVI et ses suites, des données préliminaires suggèrent qu'elle s'associe à des troubles de la conduction et une mauvaise réponse clinique au TAVI.
Une réduction de 30 % de la mortalité avec le tafamidis
L'existence d'une amylose modifie la prise en charge cardiologique et bénéficie d'un traitement spécifique dans l'amylose AL dont le pronostic a été considérablement amélioré par les nouvelles chimiothérapies et maintenant dans les ATTR.
En cas d'amylose, il faut arrêter tous les traitements de l'IC, sauf les diurétiques, prévenir le risque embolique, envisager un pacemaker en cas de troubles de la conduction. La médiane de survie après le premier épisode d’IC est inférieure à 4 ans, un pronostic que le premier traitement efficace sur l'ATTR vient transformer.
Le tafamidis stabilise le tétramère de TTR pour inhiber la production de nouvelles fibrilles amyloïdes.
L'étude ATTR-ACT avait randomisé 441 patients atteints de cardiomyopathie amyloïde à TTR pour recevoir pendant 30 mois, soit le placebo, soit le tafamidis 80 ou 20 mg. Ces patients étaient âgés en moyenne de 74 ans, étaient en stade II à III de la NYHA, avec une FEVG à 48 %, un strain altéré à moins 9 % et un NTproBNP à 3 000.
Le critère primaire, mortalité de toutes causes et hospitalisations pour causes cardiovasculaires, était très significativement réduit dans les deux bras tafamidis. La mortalité de toute cause diminue de 30 % (29,5 vs 42,9 sous placebo, p = 0,025). Il faut traiter 7,5 personnes pendant 30 mois pour éviter un décès. Le taux d'hospitalisations baisse de 32 %, un bénéfice qui se retrouve quel que soit le sous-groupe, que l'amylose soit sénile ou héréditaire. Le test de marche des 6 minutes (300 m à l'entrée), diminue de 150 m sous placebo en moins de 30 mois et se stabilise sous tafamidis, de même que la qualité de vie. « On ne constate pas de différences entre les deux dosages sur les événements majeurs mais la réponse semble meilleure, en particulier sur le NTproBNP avec 80 mg », précise le Pr Damy.
La tolérance du tafamidis est excellente, avec quelques diarrhées au début du traitement du fait d'une réactivation du transit.
Actuellement le tafamidis fait l'objet d'une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) dans l'ATTR cardiaque. Mais le prix (4 500 euros par mois pour un comprimé à 20 mg) est celui donné pour l'amylose neurologique.
D'après la communication du Pr Thibaud Damy, Centre de référence national des amyloses cardiaques et réseau amylose, CHU Henri Mondor, http://www.reseau-amylose-chu-mondor.org/Session Speed Data, CNCF, 18/10/2019
Maurer MS et al.Tafamidis Treatment for Patients with Transthyretin Amyloid Cardiomyopathy, N Engl J Med 2018; 379:1007-16, DOI: 10.1056/NEJMoa1805689
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