Dans ce bloc opératoire de l’hôpital de la Croix-Rousse, aux Hospices civils de Lyon, les deux chirurgiens, équipés d'une blouse et d'un tablier de plomb, sont secondés par un ingénieur, en plus des infirmières de bloc opératoire et de l’anesthésiste. La patiente, une femme de 70 ans qui souffre de fibrillation atriale (FA) permanente, est endormie sur la table d’opération.
Les chirurgiens incisent au niveau de l’aine et lui passent un cathéter dans l’artère fémorale. À l’extrémité du cathéter, un petit dispositif en forme de parapluie constitué d’électrodes se déploie dans l’oreillette gauche du cœur et permet l’envoi d’ondes électriques de 2 000 volts. Dès que celui-ci est en place, l’ingénieur envoie une série de décharges électriques. Aussitôt, le rythme cardiaque de la patiente se normalise sur l’écran de contrôle. Pendant toute l’intervention, une sonde échographique permet de vérifier le bon emplacement du dispositif grâce à un affichage sur des écrans de contrôle.
« La décharge électrique va court-circuiter les cellules qui provoquent la fibrillation atriale dans les veines pulmonaires en faisant éclater leur noyau. Cela coupe la communication entre la veine pulmonaire et l’oreillette et "éteint" ces foyers d’électricité anarchiques », explique l'infirmière Corinne Henry.
Cette technique, appelée électroporation, est indiquée pour les patients en FA paroxystique, ou en FA récente mais permanente. Les Hospices civils de Lyon la proposent depuis février 2023 à la place de l’intervention habituelle, qui repose sur l’ablation des zones de tissu à l’origine du trouble par radiofréquence (le chaud) ou par cryothérapie (le froid).
Une méthode plus rapide et plus simple
Concrètement, « l’ablation par électroporation ouvre des pores dans les membranes des cellules cardiaques ciblées à l’échelle nanométrique, ce qui entraîne leur destruction », détaille le Dr Samir Fareh, cardiologue à l’hôpital de la Croix-Rousse. « Nous envoyons cinq impulsions électriques de 2 000 volts pendant 200 millisecondes, que nous renouvelons autant de fois que nécessaire. Il y a davantage de manipulations à l’extérieur du patient pour préparer les électrodes, mais moins d’interventions une fois que le cathéter est en place à l’intérieur », développe-t-il.
Là où la méthode conventionnelle peut affecter les tissus voisins du cœur, comme l’œsophage ou le nerf phrénique, le traitement par électroporation permet de s’attaquer spécifiquement aux tissus cardiaques dysfonctionnels, de façon pérenne et sans abîmer la veine pulmonaire. L’intervention, d’une quarantaine de minutes, réalisée dans l’oreillette gauche, est plus courte et plus simple qu’avec les autres techniques, qui peuvent prendre près d’une heure trente.
« C’est sans commune mesure avec les techniques précédentes », témoigne le Dr Fareh. « C’est plus rapide, plus sécuritaire et au moins aussi efficace. Nous ressentons moins de pression et nous avons statistiquement moins de risques d’anomalies dans l’intervention, du fait de sa durée réduite », apprécie-t-il. La récupération des patients est plus rapide et les effets indésirables réduits. « Cette technique permettrait peut-être, à terme, de pouvoir opérer des patients plus fragiles et avec davantage de comorbidités », envisage-t-il.
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