Les nouvelles recommandations sur l’endocardite infectieuse, publiées en septembre 2015, soulignent la gravité de cette maladie et la nécessité d’intervenir précocement. Elles introduisent également plusieurs innovations (1). Ainsi, le registre Européen Euro-Endo s'est fixé pour objectif d’évaluer leur application et leur applicabilité dans toute l’Europe (2). Il a inclus plus de 3 000 patients atteints d’endocardite, en Europe et dans le monde entier, et a livré plusieurs résultats intéressants…
Endocarditis Team
Ces recommandations soulignent l’importance de mettre le patient au centre de la discussion et de pratiquer une analyse multidisciplinaire de son dossier. Elles insistent sur l’intérêt de la prise en charge de ces patients, au pronostic particulièrement sévère, dans des centres de référence par une équipe médico-chirurgicale habituée à cette pathologie. Ce concept de « Endocarditis Team » initié en France, est maintenant admis et utilisé dans la plupart des centres spécialisés dans l’endocardite infectieuse du monde entier.
Des modifications épidémiologiques et bactériologiques
Dans Euro-Endo, l’endocardite infectieuse apparaît encore comme une pathologie du sujet âgé, avec 46 % de patients de plus de 65 ans et 12 % de plus de 80 ans. Les fréquences des endocardites prothétiques (30 % des cas) et des endocardites sur pacemaker ou défibrillateur (10 % des cas) sont également très augmentées par rapport aux anciens registres. L’élément le plus marquant est certainement la diminution du nombre d’endocardites dues à des streptocoques oraux (12 % des cas), maintenant devancées par les entérocoques (16 % des cas) fréquemment observés chez les sujets âgés (autres germes : staphylocoques 42 %, S. gallolyticus 7 % …). Ces résultats, combinés au faible nombre observé de portes d’entrée bucco-dentaires, confirment le bien-fondé de la réduction de l'antibiothérapie prophylactique proposée dans les recommandations ESC de 2009 et 2015.
Rôle essentiel de l’imagerie
L’échographie garde un rôle majeur dans le diagnostic d’endocardite infectieuse. Néanmoins, les dernières recommandations ESC insistaient pour la première fois sur le rôle potentiel d’autres techniques d’imagerie cardiovasculaire, comme le scanner et le PET-scan. Le registre Européen confirme cette tendance. Il montre que, si l’échographie reste l’examen paraclinique d’imagerie le plus utilisé dans l’endocardite infectieuse, le PET-scan l’est aussi fréquemment : dans 9 % des endocardites sur valves natives et 25 % des cas d’endocardites sur prothèses valvulaires.
L’importance de la chirurgie précoce
Les guidelines de l’ESC avaient recommandé une chirurgie précoce dans l’endocardite infectieuse, dans ses trois indications classiques : hémodynamiques, infectieuses, et emboliques. Le registre Euro-Endo confirme ces données et montre la fréquence des complications emboliques, observées chez 40 % des patients. Il montre également que la mortalité hospitalière reste très élevée, en moyenne de 17,1 %. Un des résultats majeurs apportés par Euro-Endo est l’influence de la chirurgie précoce. En effet, les patients opérés ou sans indication chirurgicale ont un bon pronostic, alors que ceux éligibles à la chirurgie théorique mais non opérés en ont un très mauvais (voir figure).
Ainsi, les recommandations ESC 2 015 avaient révélé l’apport de nouvelles techniques d’imagerie parmi les critères diagnostiques majeurs, et la notion de « Endocarditis Team », soulignant l’intérêt majeur d’une prise en charge multidisciplinaire chez ces patients. Le registre Euro-Endo montre un changement important de l’épidémiologie et de la bactériologie de l’endocardite infectieuse, confirme la place croissante de l’imagerie multimodale dans sa prise en charge, et rappelle le rôle majeur de la chirurgie précoce chez ces patients.
Service de cardiologie, hôpital de la Timone (Marseille)
(1) Habib G. et al. Eur Heart J 2015 Nov 21;36(44):3075-3128
(2) Habib G. et al. Eur Heart J 2019 Oct 14;40(39):3222-32
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