LA MENTION « avec thérapie cellulaire » complétera peut-être plus vite qu’on ne le pense les compte-rendus d’angioplastie pour infarctus du myocarde (IDM). « L’injection de cellules souches en post infarctus permet de récupérer des territoires cardiaques initialement non viables, explique au « Quotidien » le Pr Patricia Lemarchand, cardiologue au CHU de Nantes et principal auteur de l’étude BONAMI évaluant le bénéfice à injecter des cellules souches autologues au 9e jour post IDM. Pour participer à l’essai, il fallait que le patient présente au moins 2 segments non viables sur les 17 définis à la scintigraphie. S’il récupérait au moins 1 segment, l’intervention était considérée comme bénéfique ».
Ce sont ainsi 101 patients plutôt jeunes, âgés en moyenne de 55 ans et présentant un IDM inaugural grave, qui ont été inclus dans l’essai. « Leur fonction d’éjection ventriculaire (FEVG) était inférieure à 45 %, poursuit le Pr Lemarchand. Une technique lourde comme la thérapie doit apporter un bénéfice au patient ». Au total, six CHU (Créteil, Grenoble, Lille, Montpellier, Nantes, Toulouse) ont participé. Les patients âgés de 18 à 75 ans étaient randomisés en deux groupes, soit angioplastie seule, soit angioplastie avec injection de cellules souches au 9e jour.
Par voie endovasculaire
Cette application en cardiologie est très différente des précédents du Pr Philippe Ménasché. L’indication tout d’abord, puisque l’équipe de l’hôpital Européen Georges Pompidou ciblait non pas l’IDM en phase aiguë mais l’insuffisance cardiaque post IDM. Mais surtout, la procédure est nettement moins invasive. Alors que le cardiochirurgien greffait au cours d’une thoracotomie pour pontage aorto-coronarien des myoblastes prélevés au niveau de la cuisse, il s’agit ici d’injecter par voie néovasculaire un concentré de cellules souches mésenchymateuses dans la coronaire malade au 9e jour post IDM. « Les cellules souches étaient prélevées au niveau de la crête iliaque du patient sous anesthésie locale, détaille la chercheuse. C’est un concentré de moelle osseuse non triée contenant des cellules souches mésenchymateuses mais aussi des lymphocytes ».
La biothérapie n’est pas efficace chez 100 % des patients. « Le tabac est un facteur prépondérant dans la réponse, souligne le Pr Lemarchand. Les fumeurs ont sans doute des cellules souches de moins bonne qualité. Le phénomène de réparation physiologique serait altéré. Nous avons considéré comme non-fumeur tout patient n’ayant pas fumé dans les 3 mois précédents ». De plus, les chercheurs ont constaté que la procédure était particulièrement bénéfique en cas d’obstruction microvasculaire visualisée à l’IRM. La technique semble sûre. « Nous avons maintenant un recul de 10 ans depuis les premières injections de cellules souches et aucun événement grave n’a été rapporté dans BONAMI ».
Vers des banques de donneurs
Comment agissent ces cellules souches ? « À l’état physiologique, les cellules souches participent au phénomène de réparation cellulaire, explique la chercheuse. Au cours d’un accident grave comme l’infarctus, le phénomène est dépassé. L’injection de cellules souches dans la coronaire malade a pour but de pallier une cicatrisation défaillante ». Un objectif radicalement différent de la greffe de myoblastes, il ne s’agit donc pas de régénérer le myocarde mais d’aider à la réparation cellulaire.
Prochaine étape : évaluer le bénéfice de la procédure sur la morbi-mortalité. Pour inclure les 1 500 patients nécessaires, le projet sera mené au niveau européen. « Parallèlement, nous suivons de très près un autre projet, celui des banques de cellules de donneurs, poursuit-elle. Dans l’IDM, il faut aller vite, on n’a pas les 3 semaines nécessaires pour isoler les cellules souches dans la moelle osseuse, les cultiver et les expandre. La technique des cellules allogéniques permettrait de résoudre le problème, ce d’autant que ces cellules particulières ne sont pas rejetées ». La technique d’expansion in vitro est bien connue, puisque la chercheuse nantaise, en collaboration avec l’équipe de Toulouse, l’utilise dans l’essai MESAMI sur l’insuffisance cardiaque. Les deux essais, BONAMI et MESAMI, ont été financés par le ministère de la Santé et l’Association française pour les myopathies (AFM), ainsi que la Fondation de France pour le second.
European Heart Journal. doi:10.1093/eurheartj:ehq455.
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