Dans une récente contribution sur le rugby de haut niveau (« le Quotidien » du 24 novembre), j'ai traité des désordres de la mêlée ordonnée et en particulier des risques de blessure liés à l'écroulement des joueurs de première ligne (piliers et talonneurs). J'aborderai cette fois un autre aspect du jeu dangereux qui tient à la façon dont se déroulent les mêlées dites spontanées, aujourd'hui communément appelées rucks ou même ruckings (de l'anglais to ruck : ratisser).
- Ce que l'on dit le plus souvent du ruck. Le ruck est défini comme la phase de jeu au cours de laquelle un ou plusieurs joueurs de chaque camp s'opposent en conservant le contact entre eux (ils doivent s'agripper) et en restant sur leurs pieds, avec pour objectif de conquérir le ballon (qui repose au sol). À la différence de la mêlée ordonnée, la mêlée spontanée ne constitue pas un arrêt de jeu décidé et sifflé par l'arbitre ; elle s'inscrit dans la continuité de l'action.
À l'évidence, il s'agit d'un épisode fréquent au cours des matches (on compte environ dix rucks pour une mêlée ordonnée), plutôt complexe dans son déroulement. De plus, cet épisode est méticuleusement encadré par de multiples règles : ainsi, il est interdit de s'agenouiller volontairement, d'effondrer le regroupement, de marcher sur un adversaire, d'avoir la tête et les épaules plus basses que les hanches, de pénétrer dans le ruck par les côtés etc. Les prescriptions sont bien définies et les arbitres s'efforcent de les faire respecter en recourant, le cas échéant, à la sanction : coup de pied franc, coup de pied de pénalité, exclusion temporaire etc. Les entraîneurs s'attachent de plus en plus à préparer les joueurs pour ces affrontements corps-à-corps et ce n'est pas pour rien que les techniciens se penchent sérieusement sur l'opération de « grattage » et sur la conduite à tenir dans « la zone plaqueur-plaqué ». Ces deux centres d'intérêt sont d'apparition récente.
- Ce qu'on oublie de dire et ce qu'on oublie… d'interdire. Il n'est pas nécessaire d'être un spécialiste de ce sport pour remarquer que cette phase de jeu devient de plus en plus violente et que, lors de ces face-à-face débridés et hyper-rugueux, les risques d'accidents sont de plus en plus élevés. Il faut se demander pourquoi. À mon sens, c'est d'abord parce qu'on ne réprime pas assez sévèrement les percussions déloyales qui ouvrent l'accès au regroupement. Rien n'est dit clairement sur la manière d'entamer l'opposition et on voit de plus en plus souvent des joueurs qui, tels des missiles, se projettent tête en avant sur l'adversaire avec l'intention de lui « faire mal » voire de le « casser ». La probabilité d'une blessure est d'autant plus forte que celui qui encaisse le coup de tête ou le coup d'épaule se trouve, lui, quasiment passif ou tout au moins à l'arrêt et dans une position d'attente.
Bref on assiste trop fréquemment à des entrées « en bélier » qui relèvent de l'agression caractérisée et qui rappellent celles qui empoisonnaient jadis la phase initiale des mêlées ordonnées. Grâce à la modification des règles ces modes d'engagement traumatisants – et pour tout dire stupides, bestiaux – ont peu à peu disparu. On peut espérer qu'on inventera une nouvelle parade adaptée cette fois à l'organisation des mêlées spontanées.
En attendant que les règles soient explicitement complétées sur ce chapitre, il faudrait dès maintenant demander aux arbitres de surveiller ces surgissements de solides gaillards lancés à pleine vitesse et ouvertement déterminés à porter atteinte à l'intégrité physique de leurs adversaires. Quitte à me répéter, j'affirmerai que le rugby doit rester un sport de contact sans pour autant verser dans le règlement de compte vachard. Le rugby est un jeu de coopération et d'opposition, ce n'est pas la guerre. Quoi qu'en disent certains entraîneurs exaltés, les rugbymen ne doivent pas se transformer en « tueurs » (sic) !
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