PAR LE Dr DAN ALEXANDRE LEBUISSON*
En 2012, le taux de complications opératoires est inférieur à 2 %. Il est plus ardu d’apprécier la fréquence des complications postopératoires faute de recueil, mais comme elle est en relation étroite avec les accidents peropératoires, on peut, à coup sûr, la considérer comme en régression. Une variation existe suivant les opérateurs, les équipements, l’expérience, les volumes, mais les facteurs de succès sont connus et nous allons les voir.
La mini-incision et les nouvelles sondes.
Une ouverture inférieure ou égale à 2,2 mm est un standard avec les nouvelles mini-sondes de phacoémulsification, petites et à effet de torsion ou multidirectionnel. Ces ouvertures réduites, non génératrices d’astigmatisme, sont très peu délétères, peu inductrices d’inflammation et sont auto-étanches. Elles complètent l’éventuelle utilisation dans les étapes précédentes d’un laser femtoseconde découpant la capsule du cristallin et créant les incisions.
Le design et le biomatériau des lentilles intraoculaires.
L’opacification de la capsule postérieure (OCP) est le principal événement indésirable après une opération réussie. Elle est favorisée par les biomatériaux hydrophiles et un dessin d’implant ne permettant pas un solide contact entre la capsule et les bords de l’optique. Il en résulte une dysphotopsie, une baisse d’acuité visuelle, voire une restriction du champ visuel associée ou non à un phimosis capsulaire antérieur. Si cette OCP se traite par ouverture au laser Yag, même tardif, c’est au prix d’un risque accru de complications rétiniennes. Les opacifications capsulaires antérieures sont moins gênantes car plus périphériques, mais elles sont aussi favorisées par des capsulorhexis imparfaits et par certains matériaux. Un soigneux nettoyage peropératoire réduit les risques de ces deux types d’opacifications.
La précision du calcul de puissance et de l’insertion.
Avant tout choix le chirurgien et le patient déterminent l’objectif visuel qui n’est pas forcément l’emmétropie. Les implants sont de plus en plus fréquemment des modèles multicorrecteurs, combinant au moins deux ou trois effets : loin, près et astigmatisme. Les mesures préopératoires tiennent compte de la puissance du défaut pour faire appel à des facteurs complémentaires avec en tout premier lieu la profondeur de la chambre antérieure et l’appréciation de la position du futur implant. Les implants monoblocs dans le sac sont aussi manifestement plus stables, surtout s’ils sont de faible puissance. Tous les implants sont injectés pour ne pas agrandir l’ouverture et réduire le risque infectieux et de manipulation mécanique.
La prévention anti-infectieuse.
Une injection d’antibiotique dans la chambre antérieure de l’œil en fin d’intervention de la cataracte réduit considérablement le risque d’endophtalmie. Le protocole suédois adopté par l’European Society of Cataract and Refractive Surgeons (ESCRS) est vérifié pour la première fois aux États-Unis dans une étude prospective (1) où la conjonction avec une instillation externe de povidone-iodée à 5 % montre un risque divisé par 22 ! Une monodose avec AMM malheureusement non prête à l’emploi (Aprokam) existe et est coûteuse.
La suppression de la correction optique résiduelle.
Longtemps, l’implantation ne résolvait de façon monofocale que le défaut sphérique. Désormais, il est possible de compenser simultanément l’astigmatisme et la presbytie. Trente-six pour cent des opérés adultes ont un astigmatisme objectif plus grand ou plus petit qu’une dioptrie. On peut traiter de défaut, soit de façon incisionnelle, soit en plaçant un implant torique. Les astigmatismes postopératoires induits sont traitables en laser cornéoplastique. L’implantation permet d’obtenir 10/10 sans correction dans 85 % des cas. La presbytie est idéalement traitée par une lentille intraoculaire multifocale. Les modèles sont nombreux en formes, concepts et effets. Les choix peuvent différer entre les deux yeux. L’astigmatisme peut s’ajouter en correction. Les résultats sont excellents dans 95 % des cas. Des effets secondaires ne sont pas exceptionnels et un très petit nombre de patients ne sont pas de bons candidats. Les moins bons résultats sont constatés chez le myope, mais, à l’inverse, ce dernier est plus ouvert aux compensations monofocales en monovision.
L’environnement opératoire.
Aucun débat ne subsiste chez l’adulte : l’analgésie topique est le procédé de choix, le moins invasif, aussi efficace, ergonomique et économique. Le recours à une prémédication ou à une sédation est optionnel et dépend de la présence ou non d’un anesthésiste et des demandes du chirurgien et du patient. Le suivi postopératoire est simplifié. La visite à 24 heures a peu de logique et celle de J2 ou J3 est préférable. L’ambulatoire est la règle. La prescription postopératoire est très simple et se limite à une combinaison anti-inflammatoire et antibiotique environ 2-3 semaines. Les interventions bilatérales rencontrent une audience élargie qui choque encore la majorité des chirurgiens, mais qui, somme toute, n’expose pas, à ce jour, à un risque de complications bilatérales infectieuses. En revanche, la réduction de la tarification laisse bien peu de place dans notre pays à une expansion des indications.
Tous ces progrès se soldent par une sanction financière bien entamée en T2A. Les implants de technologie avancée sont plus chers, le laser femtoseconde est hors de prix et le dépassement d’honoraires est décapité, on ne peut attendre de retour que par l’augmentation des volumes : attendons donc le justificatif « investigationnel », qui permettra d’opérer la conscience tranquille tous les cristallins, mais la gouvernance saura alors brider le tarif.
* Clinique de la Vision, Paris
(1) Shorstein NH, Winthrop KL, Herrinton LJ. J Cataract Refract Surg 2013;39(1):8-14.
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