Nécessité
Malgré les réunions d’informations préopératoires, les documents référencés, les nombreuses explications fournies par le chirurgien et l’équipe pluridisciplinaire, beaucoup de patients n’entendent pas et ne comprennent pas la nécessité de ce suivi à vie.
La répétition des consignes par tous les soignants est la garantie de la réussite de cette opération qui consiste à réaliser une petite poche gastrique de 20 ml à laquelle le chirurgien va anastomoser une anse du jéjunum distal en court-circuitant le duodénum et le jéjunum proximal.
Le mode d’action de cette chirurgie est double : restrictif en raison de la petite poche gastrique et
malabsorptif par l’exclusion de la grande courbure et au court-circuit digestif.
Principales carences après un by-pass
1. Carence d’apports en protéines : la diminution des apports alimentaires, en postopératoire immédiat avec pour conséquence la dénutrition protéique dont le marqueur sérique est le taux d’albumine.
Elle est malheureusement le plus souvent asymptomatique, parfois marquée par la chute des cheveux et une asthénie très importante liée à la fonte musculaire.
Le seul moyen de l’éviter est le respect des consignes de fractionnement des prises alimentaires : 3 repas principaux et 2 à 3 collations réparties dans toute la journée. La consommation d’au moins 100 g de viande ou de poisson ou deux œufs, deux fois par jour, est impérative.
2. Carence en fer
Toujours en raison de la diminution des apports alimentaires et de la diminution de la production d’acide chlorhydrique dans la petite poche gastrique, il y a donc moins d’ions ferreux pour l’assimilation.
Il y a également une diminution de l’absorption qui se fait en priorité au niveau du duodénum et du jéjunum proximal qui sont hors circuit alimentaire.
La carence en fer est révélée par une anémie microcytaire qui contribue à l’asthénie.
La prévention repose sur une prescription de fer et de vitamine C.
3. Carence en vitamine D
Déjà très fréquente dans toute la population du nord de l’Europe, elle l’est d’autant plus dans cette population ; de la vitamine D doit être donnée en préopératoire afin de limiter la carence postopératoire.
Les symptômes d’hypocalcémie sont rares mais il convient de doser la parathormone car il existe dans 50 % des cas une hyperparathyroïdie secondaire. Le risque est l’ostéomalacie ; les risques d’ostéoporose et de fractures ne sont pas connus à long terme. Les dosages de la vitamine D et de la parathormone permettent de gérer ce risque en supplémentant les patients en vitamine D afin de normaliser le taux de parathormone et d’atteindre un taux de vitamine D supérieur à 75 nmol/l. Les formes retard de vitamine D favorisent l’observance.
4. Carence en calcium
Les apports sont corrects mais seuls 20 % du calcium ingérés sont absorbés car le site d’absorption est le duodénum et le jéjunum proximal qui sont court-circuités : cette malabsorption est aggravée par la carence en vitamine D. Il n’y a pas lieu de supplémenter systématiquement en calcium sauf en cas de carence avérée malgré un taux normal de vitamine D.
5. Carence en vitamine B12
Due à un manque de facteur intrinsèque, la carence est tardive car les réserves de l’organisme sont de deux à quatre ans mais doit être prévenue. Il est indispensable de supplémenter les patients par des injections en IM de 1 000 µg de vitamine B12 dont le rythme est adapté selon le dosage sanguin. Les déficits neurologiques observés sont irréversibles mais exceptionnels.
6. Déficit en folates
Seuls 30 % des besoins sont couverts du fait de la diminution des apports alimentaires. Ce déficit est facile à contrôler par la prise de suppléments polyvitaminiques sans oublier, en cas de désir de grossesse d’adjoindre en préconceptionnel, 0,4 mg d’acide folique par jour.
7. Carence en vitamine A
La diminution des apports est en cause. Un complément vitaminique apportant 5 000 UI/jour doit être prescrit.
8. Carence en zinc
La diminution des apports entraîne chute des cheveux, anorexie et anémie. La carence en zinc est à rechercher en cas de désir de grossesse car risque d’hypogonadisme et d’anomalies de l’ostéoformation. La supplémentation repose sur 30 mg à 60 mg de gluconate de zinc à distance de la prise de fer et d’un repas.
9. Carence en vitamine B1
Liée à la diminution des apports, aggravée en cas de vomissements elle est gravissime si méconnue : des syndromes de Gayet-Wernicke sont exceptionnels mais possibles et irréversibles. Une des causes possibles, en dehors des vomissements, peut-être une perfusion de sérum glucosé sans supplémentation en B1 chez les patients opérés qui vomissent depuis plusieurs jours.
La prévention passe, pour certaines équipes, par la prescription systématique en postopératoire durant six mois de vitamine B1 (il n’y a aucun risque de surdosage).
En conclusion
La chirurgie de l’obésité augmente l’espérance de vie des grands obèses, diminue la mortalité par maladie cardio-vasculaire et cancers mais expose le patient à des carences qui peuvent mettre en jeu sa qualité de vie future s’il n’a pas intégré la nécessité du suivi à vie qui consiste en un bilan sanguin régulier : tous les trois mois la première année postopératoire, tous les 6 mois ensuite enfin une fois par an la vie durant si tout va bien.
L’ordonnance comportera systématiquement des polyvitamines, de la vitamine B12, du fer et de la vitamine D, du calcium si besoin avec du zinc et des folates selon les dosages sanguins.
La place du médecin traitant est centrale car le nombre de patients opérés augmente rendant le relais médical indispensable après la phase aiguë postopératoire.
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