FA avec contre-indication aux anticoagulants

Le système watchman implanté à Lille

Publié le 04/06/2012
Article réservé aux abonnés
1338772364353367_IMG_84915_HR.jpg

1338772364353367_IMG_84915_HR.jpg
Crédit photo : DR

UNE MÉDUSE dans le cœur. Le dispositif watchman ressemble étrangement à l’animal marin. « L’auricule en forme de doigt de gant est le lieu électif de formation des thrombus en cas de fibrillation auriculaire (FA), rappelle le Pr Didier Klug, cardiologue au CHRU de Lille, dont l’équipe est pionnière dans l’implantation du dispositif en France. L’objectif du système est de fermer mécaniquement cet appendice atrial, ce qui empêche la formation de caillots. Cette intervention permet ainsi de se passer de traitement anticoagulant (ACG) au long cours ». Les deux patients opérés en avril dernier au CHRU de Lille se portent bien. Si cette option n’est recommandée actuellement en Europe qu’aux patients en FA ayant une contre-indication aux ACG, les indications pourraient s’élargir à l’avenir. « Par exemple, aux patients peu compliants au traitement ACG », indique le cardiologue.

Contrôle continu par ETO.

L’implantation du système est réalisée de façon courante aux États-Unis, mais aussi en Allemagne, où un nombre considérable de dispositifs sont implantés. Deux études ont apporté la preuve de l’efficacité du dispositif en prévention des accidents vasculaires cérébraux (AVC). La première, l’étude randomisée Protect AF, a montré la non-infériorité par rapport à la warfarine, chez plus de 800 patients sans contre-indication aux ACG. La seconde, récemment présentée au congrès de la Heart Rhythm Society (HRS) mi-mai, a mis en évidence une réduction du risque d’AVC de 75 % de manière spécifique chez des patients ayant une contre-indication aux ACG. « Les recommandations européennes mentionnent qu’un système d’occlusion auriculaire est une possibilité en cas de contre-indication aux ACG, note le Pr Klug. L’implantation de watchman est autorisée en France dans le cadre d’un registre dédié. »

L’implantation se fait en percutané par voie d’abord fémorale. « L’intervention s’effectue sous anesthésie générale car elle nécessite un contrôle par échographie transœsophagienne (ETO) durant toute la durée de la procédure, explique le Pr Klug. Dans un premier temps, le cathétérisme de l’oreille gauche par voie transseptale permet de vérifier les dimensions de l’auricule en injectant du produit de contraste pour l’angiographie ». Les données angiographiques et échographiques doivent être concordantes pour pouvoir choisir la taille du dispositif. Ensuite, vient la délicate étape du positionnement dans l’oreillette gauche. « Il faut souvent s’y reprendre à 2 ou 3 fois, explique le Pr Klug.Voire en mettre deux côte-à-côte. »

Endothélialisation du dispositif

Le système est mis en place, de sorte que la partie « parachute » est déployée du côté de l’ostium, les barbillons s’implantant dans l’auricule. « Un traitement ACG est nécessaire le temps de l’endothélialisation du système, explique le Pr Klug. La société watchman recommande de prescrire des antivitamines K pendant 45 jours postimplantation puis de faire un relais par clopidogrel pendant 180 jours. » Les complications possibles existent, à savoir la perforation avec le risque de tamponnade, l’embolisation du système dans la circulation et l’embolisation gazeuse, mais sont de moins en moins fréquentes. « Chaque nouveau centre est assisté d’un cardiologue expérimenté lors des premiers cas, rassure-t-il. À Lille, nous sommes allés nous former à Berlin et un cardiologue allemand sera encore présent avec nous au bloc opératoire lors des prochaines interventions. »

Le centre de Lille prévoit de poser 15 à 20 dispositifs par an. « Nous essayons d’obtenir la cotation de l’acte, ce qui est le frein principal à sa réalisation, explique le chirurgien. De nombreux patients sont potentiellement candidats à la technique, puisque près de 17 % des sujets en FA présentent des contre-indications aux ACG. » D’autres centres français ont le projet d’emboîter le pas à l’équipe lilloise. « Et les nouveaux ACG ne sont pas une solution révolutionnaire, tient à souligner le Pr Klug. Il faut garder à l’esprit que tout ACG comporte un risque hémorragique. »

Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Médecin: 9135